Quinze ans après, Attac plus d’actualité que jamais

Face au durcissement des politiques néolibérales, Attac a retenu comme axe prioritaire d’action celui de la transition sociale, écologique et démocratique.

Dominique Plihon  et  Gustave Massiah  • 18 juillet 2013 abonné·es

Depuis sa création, il y a quinze ans, Attac a connu de réels succès dans la bataille idéologique. L’association a d’abord marqué des points dans la dénonciation de la mondialisation néolibérale et dans les propositions qui pouvaient en découler (taxe sur les transactions financières, paradis fiscaux et judiciaires, dérive néolibérale de l’Europe, etc.). La récupération purement verbale de quelques-unes de ces propositions par les gouvernements ne fait que souligner l’urgence de leur mise en œuvre effective. Après 2008, nous avons contribué à la prise de conscience de la nature très profonde de la crise. Mais la bataille idéologique, si elle est nécessaire, n’est pas suffisante.

C’est ainsi qu’Attac a participé à la montée en puissance du mouvement altermondialiste, qui prolonge et renouvelle les mouvements historiques des périodes précédentes (le mouvement des libertés civiles et politiques, le mouvement ouvrier, le mouvement de la décolonisation) et se construit autour de principes majeurs : la diversité et la légitimité de toutes les luttes contre l’oppression, l’orientation stratégique de l’accès aux droits pour tous et l’égalité des droits, une nouvelle culture politique qui relie engagement individuel et collectif. Face à l’impunité des transnationales qui épuisent les ressources de la planète, Attac s’est mobilisée avec ses partenaires pour dénoncer les basculements incontrôlables à l’œuvre, tant sur le plan social, avec la dégradation des conditions de travail et l’augmentation des inégalités, que sur le plan environnemental, avec la fuite en avant extractiviste et le dérèglement climatique, contre lequel aucun accord international n’a été conclu depuis vingt ans. Depuis 2008, des mouvements massifs, quasi insurrectionnels, témoignent de l’exaspération des peuples. Même si ce n’est pas sur une analyse d’ensemble que démarrent ces révoltes, elles ont un soubassement commun dans la crise démocratique qui sape la légitimité des pouvoirs. Les mouvements récents au Brésil ou en Turquie se rattachent au nouveau cycle de luttes et de révolutions qui a commencé il y a moins de trois ans à Tunis, s’est étendu à l’Égypte et au Moyen-Orient, a traversé la Méditerranée et s’est propagé en Europe du Sud, en Espagne, au Portugal, en Grèce, puis en Amérique du Nord, au Chili, au Sénégal, en Croatie.

Ce cycle repose sur la faillite des systèmes d’éducation et des services publics, la généralisation de l’endettement de la jeunesse, les grands projets inutiles (Taksim, les stades de la Coupe du monde de football, Notre-Dame-des-Landes, etc.), le déni de démocratie. Il s’en prend aux pouvoirs économique et politique, désormais imbriqués dans une oligarchie politico-affairiste, responsable de la dictature du pouvoir financier et de la « démocratie de basse intensité » qui en résulte. En France, la rentrée 2013 aura lieu dans un contexte difficile, marqué par l’approfondissement de la crise dans le pays et dans la zone euro. Tous les indicateurs seront au rouge : activité déprimée, montée du chômage, déflation salariale, déséquilibres budgétaires et extérieurs, transition écologique bloquée par l’absence de volonté politique. Le gouvernement et sa majorité, affaiblis par la déception du peuple de gauche et par les affaires mettant en cause l’oligarchie à laquelle ils appartiennent, seront confrontés à la montée des forces politiques réactionnaires et nationalistes qui menacent sans cesse davantage la démocratie. Mais un fort potentiel de rebond des luttes sociales existe : Attac compte y jouer tout son rôle pour favoriser les convergences, seules en mesure de construire un réel rapport de forces. Face au durcissement général des politiques néolibérales, et en phase avec les débats qui traversent les forums sociaux mondiaux, Attac a retenu comme axe prioritaire de réflexion et d’action celui de la transition sociale, écologique et démocratique, qui implique des ruptures radicales face au modèle économique dominant.

Dans cet engagement, Attac entend mener conjointement deux démarches : penser la transition comme une visée globale déclinée dans ses mobilisations et campagnes, et mettre en évidence les alternatives concrètes qui sont déjà expérimentées localement sous la pression des mouvements sociaux. Ces deux démarches sont portées à tous les niveaux de l’association et, particulièrement, par ses comités locaux. Dès les premiers jours de la rentrée, Attac va devoir contribuer à la mobilisation de la société pour affronter trois enjeux considérables : la réforme des retraites inscrite dans la stricte continuité des réformes précédentes ; le démarrage des négociations en vue de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis ; la lutte contre l’évasion fiscale et pour l’instauration, aujourd’hui remise en cause par la Banque centrale européenne et par Bercy, de la taxe sur les transactions financières dans la zone euro.

Gustave Massiah
Membre du conseil scientifique d’Attac.

Dominique Plihon
Porte-parole d’Attac.

L’université citoyenne d’Attac , « Ruptures et transitions », se tient à Nîmes du 26 au 29 juillet.

Attac France : 01 56 06 43 63, universite.ete@attac.org. Attac Nîmes : 06 33 39 84 76, nimes@attac.org

Idées
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