Duel d’écrivains

Une plaisante farce croate opposant un Tolstoï terrifiant au jeune Tchekhov.

Gilles Costaz  • 12 avril 2007 abonné·es

L’écrivain croate Milo Gavran est si célèbre dans les Balkans qu’un festival lui est consacré en Slovaquie chaque année. En France, nous ne le découvrons qu’aujourd’hui, et ce n’est pas tout à fait un événement. Au moins, voilà un esprit libre et blagueur qui s’amuse avec les grandes figures de notre histoire. Dans Tchekhov a dit adieu à Tolstoï, il imagine que l’auteur d’ Anna Karenine invite chez lui, dans sa maison d’Isnaïa Poliana, l’étoile montante de la littérature russe. Le jeune Tchekhov est accompagné de sa femme, la comédienne Olga Knipper. Quant à l’épouse de Tolstoï, elle est bien là, en désaccord permanent avec son illustre conjoint. Rien de vrai dans tout cela. Milo Gavran se permet toutes les fantaisies puisque Tchekhov jeune ne connaissait pas Olga et, surtout, cette rencontre n’a jamais eu lieu. C’est une farce où tous les coups sont permis, surtout à l’encontre de Tolstoï, figuré comme un personnage vaniteux, cruel et fornicateur !

Gavran, en fin de pièce, chausse sans doute de trop gros sabots. Mais la pièce commence en filant son tricot pervers avec une certaine séduction. La mise en scène de Marie-France Lahore joue l’élégance au lieu de suivre l’auteur dans toutes les farces qu’il a combinées. On attendra plus désormais de ce metteur en scène qui sait associer la rigueur et l’harmonie. Jean-Claude Drouot s’amuse plaisamment à composer un Tosltoï assez terrifiant, un ogre de conte de fées, libidineux de surcroît. Marie-France Santon est madame Tolstoï dans une riche palette de maussaderies et de fâcheries. Camille Cottin et Thomas Dewynter jouent le couple Tchekhov avec charme, ingénuité et une belle vitesse d’exécution. Le tout est gros comme des noces et banquets chez des buveurs qui connaissent leurs classiques. On peut se laisser contaminer par l’ambiance de ces joyeux drilles !

Culture
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