La foi de Sarkozy

Patrick Piro  • 10 mai 2007 abonné·es

Et « la France fera de ce combat son premier combat » … Nicolas Sarkozy, dans son discours de dimanche soir, n’évoquait pas la sécurité, l’emploi ou l’immigration, mais le réchauffement climatique ! De quoi écorcher bien des oreilles, tant ce propos, le plus responsable de ceux qu’il ait tenus sur le sujet, détonne avec la distraite préoccupation qu’il affichait jusque-là. Car si l’on se réfère à « L’Alliance pour la planète », en matière d’environnement, c’est bien du plus mauvais des présidents potentiels que la France s’est dotée. Ce collectif associatif avait noté 8,5/20 le programme de Nicolas Sarkozy, en queue du peloton en compagnie des classiques cancres du sujet ­ l’extrême droite et une partie de l’extrême gauche. Le candidat de l’UMP ne s’est rallié à aucun des quatre moratoires demandés par l’Alliance. Les autoroutes ? Pour Sarkozy, toucher à la mobilité, c’est attenter à un droit fondamental. S’opposer aux incinérateurs de déchets ménagers ? C’est le savoir-faire de l’industrie française qui est en jeu. Le nucléaire ? Il s’est exprimé sans honte lors du débat télévisé contre Ségolène Royal : c’est le progrès, un fleuron de la technologie nationale, le fer de lance de l’indépendance énergétique du pays, l’arme de la réduction des gaz à effet de serre
[^2] ! Seul petit état d’âme, sur les OGM, dont il ne serait pas vraiment convaincu de l’utilité. Gageons que les semenciers se chargeront de le rassurer.

On a coutume de dire qu’une mue s’opère en l’ex-candidat au moment où il enfile les habits du président. Faut-il distinguer, sur les épaules de Sarkozy, le costume de Zorro du climat ? Sa détermination est notoire, mais tout permet de douter a priori qu’il nous prépare une surprise du chef. D’abord parce que son discours à très large spectre sacrifie à une tradition bien française, celle de l’adresse à l’humanité, qui a séduit tous ses prédécesseurs titulaires du trône. Ils ont identifié le dérèglement climatique comme un bon terrain de péroraison internationale ­ c’est-à-dire de peu de frais pour des dirigeants nostalgiques du rayonnement de la France. Mais, surtout, parce que la conviction profonde de Sarkozy, c’est que l’environnement est une contrainte, devenue assez embêtante, dont il suffit d’assurer la compatibilité avec l’économie et la croissance. Son plan de bataille ? La foi simple du charbonnier, avec laquelle il déclarait, signant le Pacte écologique de Hulot : « Je suis convaincu que nous pouvons parvenir à diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre sans pourtant renoncer au niveau de confort souhaité par nos concitoyens. »

[^2]: À ce sujet, voir le blog des rédacteurs de Politis : .

Écologie
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