À l’atelier

En mai 1968, le peintre Bernard Rancillac participe à la production d’affiches aux Beaux-Arts

Christophe Kantcheff  • 26 juillet 2007 abonné·es

En mai 1968, Bernard Rancillac a 37 ans. Peintre déjà reconnu, il a participé, avec Hervé Télémaque, à la création de la Figuration narrative, d’inspiration Pop Art. « J’habitais rue des Carmes, entre le Panthéon et la place Maubert , raconte-t-il. Une nuit de début mai, j’ai été réveillé par des coups sourds : des pics attaquaient les pavés. Je suis sorti voir. Et je n’ai plus beaucoup dormi chez moi pendant un mois. » Très vite, il a rejoint l’atelier de l’école des Beaux-Arts, qui a produit des centaines d’affiches sérigraphiées pendant toute la durée du mouvement. « Il y régnait une effervescence incessante , se souvient-il. Les portes étaient toujours ouvertes, et il se disait souvent qu’il y avait là des flics en civil venus contrôler nos activités. On arrivait de partout pour chercher des affiches. Chaque visiteur pouvait en confectionner une. Mais les plus réussies ont été réalisées par des peintres : Arroyo, Aillaud et Cueco, de même que Fromanger, Ségui… Bien sûr, nous ne les signions pas. Même si, aujourd’hui, on peut en identifier plusieurs. » On doit notamment à Bernard Rancillac la fameuse affiche réalisée à partir d’une photo de Cohn-Bendit éclatant de rire au nez d’un CRS.

Depuis ses premiers tableaux, Bernard Rancillac avait la fibre politique. En 1966, il avait décidé de réaliser des toiles de tous les événements de l’année. C’est ainsi qu’il prit pour sujets l’affaire Ben Barka et la guerre du Vietnam. Mais, en mai 1968, il n’a pas eu le temps de peindre. « J’étais pris par les événements et l’activité à l’atelier des Beaux-Arts. » Pour Bernard Rancillac, pendant quelques semaines, création et politique n’ont plus fait qu’un.

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