« Le pluralisme doit être au cœur des dynamiques politiques »

Membres ou non du PCF, les Communistes unitaires sont partisans
de la création d’une nouvelle force de transformation sociale et écologique, incluant une sensibilité communiste. Entretien avec l’un de leurs animateurs, Gilles Alfonsi*.

Denis Sieffert  • 27 novembre 2008 abonné·es

Qui sont les Communistes unitaires ? Comment vous définissez-vous ?

Gilles Alfonsi : La visée concrète des Communistes unitaires est la constitution d’une nouvelle force de transformation sociale et écologique, au service d’un nouveau projet politique. Cette proposition s’appuie sur une conviction simple : pour contester l’hégémonie du social-libéralisme sur la gauche, en conservant la vocation majoritaire de la dynamique politique à construire, il est nécessaire que la gauche de gauche s’unisse. Aucune formation politique n’est à même de rassembler autour d’elle les forces alternatives.
À l’inverse de l’idée commune selon laquelle le projet politique est une condition préalable pour constituer une force, je pense que l’élaboration d’un projet politique nécessite l’existence d’un creuset pluraliste, en lien avec les luttes et incluant les échéances électorales sans en faire le centre de la démarche.
Pour ne pas en rester au stade de l’incantation, certains acteurs de la gauche alternative – à ce stade, les Alternatifs, les Collectifs unitaires antilibéraux, des courants de l’écologie radicale et nous – ont lancé l’idée de fédérer leurs efforts, avec la volonté d’associer d’emblée des citoyens sans appartenance politique. Pour les Communistes unitaires, cette « fédération » peut être une première étape : un regroupement partiel. Si dans les prochains mois se profilait un cadre plus large pour faire force politique ensemble, nous en serions partie prenante. Enfin, nous pensons que l’existence d’une sensibilité communiste dans cet espace peut être utile au mouvement tout entier.

Que pensez-vous de la décision de Jean-Luc Mélenchon et de Marc Dolez de quitter le PS et de fonder un nouveau parti ?

Leurs choix contribuent à ouvrir une nouvelle phase. Pour le moment, ils constituent leur propre espace politique, disons un « pôle républicain ». Cela laisse entière la question de la convergence de toutes les sensibilités de la gauche alternative pour un nouveau projet et une nouvelle force. Je souligne au passage que le débat devrait aussi concerner la forme « parti ». En positif, il s’agit de prendre en compte les aspirations démocratiques qui émergent dans toutes les mobilisations, donc de revisiter les questions de délégation de pouvoir et d’appropriation citoyenne de la politique.
Ce serait mener à l’impasse que de structurer durablement des pôles séparés – autogestionnaire, républicain, écologiste, etc. – alors que toute la question est la rencontre de ces cultures militantes et la production de contenus nouveaux. Comment pourrait-on produire une visée anthropologique, si l’on continue de séparer le social et l’écologique ? Ou si l’on n’aborde pas, simultanément, les questions du rapport aux institutions et de la délégation de pouvoir, de la place de l’État et de l’appropriation des savoirs et des pouvoirs ? Chacun peut évidemment aborder ces questions de son côté, mais alors on en revient au problème de l’émiettement face à Sarkozy et à la faillite social-libérale. Par ailleurs, il n’y a pas d’alternative politique possible sans que le travail de fond ne prenne force politique. C’est le sens de notre proposition que le cadre unitaire précieux issu de l’Appel de Politis engage un processus concernant la constitution d’une organisation politique. Il ne s’agit pas de précipiter les choses mais d’avancer, patiemment mais avec détermination, dans ce sens.

Quelle place comptez-vous occuper dans la campagne pour les prochaines élections européennes ?

Je ne confonds pas cet enjeu avec la question de l’alternative globale et de la force politique. À propos des européennes, nous n’en sommes plus seulement aux déclarations d’intentions pour une convergence la plus large possible de la gauche de gauche. Nous en sommes à voir comment lancer une dynamique du type de celle de 2005 contre le traité constitutionnel européen, impliquant à la fois des forces et le plus grand nombre de citoyens possible. C’est l’intérêt bien compris des forces politiques de la gauche de gauche de choisir une telle démarche : il n’y aura pas de dynamique politique sans appropriation citoyenne, notamment en cassant les barrières entre mouvement social et politique. Cela va au-delà d’un compagnonnage entre partis politiques, ou entre partis politiques et personnalités. Et c’est autre chose qu’une politique de ralliement. Nous sommes très favorables au lancement d’un appel type « Appel des 200 », le plus unitaire et le plus large possible.

Politique
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