Un danger très net

Un documentaire sur la vente de médicaments
sur Internet. Un marché qui se révèle juteux.
Et cause des milliers de décès chaque année.

Jean-Claude Renard  • 5 février 2009 abonné·es

L’occasion fait le larron. Internet est devenu une plaque tournante du commerce mondial. Avec ses torts et travers, une circulation de marchandises licites et illicites. Une réalité lucrative et inquiétante. Au cœur de la circulation, le trafic des médicaments sur la toile rapporterait 40 milliards d’euros de profits. Il est aussi à l’origine de milliers de décès chaque année. Il n’empêche, même dans l’espace protégé de l’Union européenne, rien de plus simple que d’avoir accès à des produits dont la vente est pourtant réglementée. Selon les sites, il n’est pas besoin de voir un médecin ni de présenter une ordonnance. C’est l’embarras du choix sur la toile, du Prozac au Viagra. En quelques clics.

Historien et ethnologue de formation, Mikael Koutouzis est expert auprès de la Commission européenne de l’ONU, spécialisé dans la lutte contre les trafics en tout genre et le blanchiment d’argent. Avec Patrice du ­Tertre, il rend à travers ce documentaire un rapport en images sur un marché juteux, accompagné de ses dérives à l’heure de la communication immédiate (et tous azimuts). Où l’on observe que les demandes du patient (et client) sont traitées automatiquement dans un data center, chambre forte abritant des centaines d’ordinateurs, dans lesquels circulent des millions d’informations sur les personnes. Des lieux de haute technologie qui hébergent sans scrupule n’importe quel site. C’est le profit qui domine. Les sociétés d’hébergement se dissimulent derrière une technologie et des pratiques dans l’air du temps, se justifient derrière les responsabilités individuelles, en l’absence de législation forte, encadrée. Où l’on observe aussi qu’à travers le rachat d’une société à l’autre, d’un pays à l’autre, les distributeurs contournent discrètement les interdits.

C’est ainsi que l’on retrouve des fabricants de médicaments en Ukraine, des conditionneurs en Allemagne, des hébergeurs aux Canaries, des comptes off shore à Chypre, des boîtes anglaises financées par la mafia russe. Voilà pour la seule Europe dans ce road-movie sur la santé publique, qui relève 90 % d’arnaques. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de se procurer sans ordonnance tel ou tel médicament : pour le client, une pilule sur trois ne contiendrait pas la bonne dose de principe actif. Dans le meilleur des cas, un peu de bonne dose. Dans le pire, du lactose.

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