Pédagogie montebourgeoise

Sébastien Fontenelle  • 4 juin 2009 abonné·es

Nous ne manquons certes pas, en France, de « socialistes » courageux, comme, par exemple, Manuel Valls, qui vient de confirmer qu’il voterait « la loi Estrosi sur les bandes » – parce que bon, estime-t-il : nonobstant l’arsenal hypersécuritaire que la droite régimaire a déjà déployé depuis 2002, « la création d’une nouvelle infraction pour participation à une bande violente pourrait combler utilement une lacune du droit » , ou si on préfère laisser le champ libre aux Bloods et aux Crips jusque dans les rues d’Authon-la-Plaine ^2 ?

Mais le plus courageux de nos « socialistes » est, de très loin, et sans conteste, notre légendaire député de Saône-et-Loire : Arnaud Montebourg.
Dès le 29 mai, en effet – moins de 48 heures, donc, après la libération de Julien Coupat –, Arnaud Montebourg a (courageusement) dénoncé, dans une tribune publiée simultanément par les sites informatifs Bakchich et Rue 89, l’interminable détention (de six mois) de Julien Coupat.

Et il est parfaitement vrai que, durant que Julien Coupat croupissait dans sa geôle, Arnaud Montebourg a négligé de s’offusquer publiquement d’une incarcération que rien, comme on sait, ne justifiait.
Mais on aurait (grand) tort de supposer, comme l’ont fait sur le Net quelques impertinent(e)s, qu’Arnaud Montebourg s’est tu par négligence, ou par désintérêt, ou pour quelque autre obscure raison que la raison ignore, car en vérité son (interminable) silence relevait d’une (très) fine stratégie.
Cela, ce n’est pas moi qui le dis.

C’est Arnaud Montebourg himself qui l’écrit, dans une (ahurissante) réponse aux internautes qui ont moqué son opportunisme : « Si la justice elle-même ne s’était pas mise en situation de devoir libérer Coupat pour insuffisance de charges » , notre légendaire député de Saône-et-Loire juge – en toute modestie – que son intervention « n’aurait pu prendre cette force politique » admirable qui la singularise, et que nul(le) ne pourrait « convaincre […] la société française que cette affaire constitue une manipulation » . (Alors que là : Arnaud Montebourg, par la seule magie de son verbe, a su mobiliser l’opinion en faveur des « neuf de Tarnac ».)
En somme, et en résumé : si Arnaud Montebourg s’est tu, pendant que d’autres, moins subtil(e)s, se battaient quotidiennement pour que Julien Coupat sorte enfin de prison, c’est parce qu’il attendait – confiant – que la justice désincarcère le jeune homme.

Ami(e), si tu es pris(e) en otage, le mieux est que tu ne comptes pas trop sur Arnaud Montebourg pour hâter ta libération : il attendra probablement qu’on t’ait relâché(e) pour te tendre une main secourable. Histoire de mieux démontrer que le kidnapping, c’est pas bien.

Publié dans
De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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