« L’ambition ne court pas les rues »

Directeur du théâtre des Halles, Alain Timar* accueille les artistes
qu’il aime. Il décrit ici
le festival dont il rêve pour Avignon.

Gilles Costaz  • 17 juillet 2009 abonné·es

Politis : Vous êtes farouchement opposé
à l’appellation « off »…

Alain Timar I Oui, ce mot distingue abusivement une prétendue séparation. Il y a un seul festival. Les compagnies indépendantes ont toujours su se faire remarquer parallèlement à la programmation officielle et l’ont parfois rejointe quand elles ont été invitées par Faivre d’Arcier ou Crombecque à faire partie de leur programme. Avignon, c’est un mi­racle comme laboratoire, comme lieu de convivialité entre les artistes eux-mêmes et avec le public, et comme questionnement sur la société.
Évidemment, il faut distinguer les équipes qui viennent faire du beau et bon théâtre, et les responsables de lieux qui ne pensent qu’à gagner de l’argent. Certaines troupes sont véritablement ambitieuses et impliquent des auteurs contemporains. Mais, où qu’on se place, dans les lieux officiels ou dans les lieux improbables, cette ambition ne court pas les rues.
J’ai réduit le nombre de spectacles dans mon théâtre des Halles pour qu’il se distingue des autres et que les artistes puissent se rencontrer davantage, échafauder des projets communs. Les artistes doivent rêver dans la ville, dans sa dimension historique.

Que peut-on améliorer ?

On peut se demander si mes rêves d’un fonctionnement comme je l’entends relèvent de l’état des lieux, de l’utopie ou de l’Atlantide ! C’est un peu les trois. Il y a ces bonnes équipes. Il y a ce mercantilisme. Et il y a des choses englouties, comme le fut l’Atlantide, particulièrement ces rencontres du Verger, où les festivaliers et les artistes allaient jusqu’à s’étriper. On peut le regretter. Tout est sage, dans la logique du produit culturel, de la consommation. Or, le théâtre est tout sauf un produit. Et l’utopie serait que de nouvelles relations s’établissent entre certains lieux d’Avignon et que certaines questions soient posées. On ne peut pas reprocher aux directeurs du festival officiel, Hortense Archambault et Vincent Baudriller, d’avoir une grande ambition artistique, un peu exclusive. Mais ils pourraient s’interroger davantage sur ce qui se passe ailleurs, aller au-delà du dialogue actuel – qui existe. Il est temps d’ouvrir entre nous un chantier exploratoire.

Culture
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