Ceux qui refusent le travail jetable

Sophie Béroud et Paul Bouffartigue explorent la montée de la précarité et les formes de résistance.

Thierry Brun  • 10 décembre 2009 abonné·es

Au début des années 2000, les cadences élevées, les conditions de travail pénibles et les temps partiels plus ou moins contraints ont poussé les salariés du McDonald’s de Strasbourg-Saint-Denis, à Paris, à se mettre en grève et à médiatiser ce slogan : « Ça ne se passera plus comme ça chez McDonald’s. »
Ce mouvement exceptionnel a agrégé autour de lui des salariés d’autres enseignes. Il fut par la suite un symbole du refus de l’exploitation, du travail jetable, et un point d’appui politique qui a dépassé la CGT commerce, laquelle n’a guère profité de cette capitalisation militante.

Cet épisode, puisé dans un essai rassemblant une vingtaine d’études conduites en France, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Espagne ou en Argentine, souligne le peu de temps et de moyens employés par les organisations syndicales « pour interroger leurs capacités à intégrer durablement dans leurs rangs les salariés qui ne relèvent pas de statuts stables » . Ce qui semble faire défaut, à l’heure actuelle, dans le mouvement syndical français, c’est « avant tout la volonté de penser l’enjeu de la précarisation de façon globale » . Aussi est-ce du côté des mouvements de chômeurs que sont nées des initiatives concrètes d’élargissement aux « précaires » et de construction de collectifs transversaux, constate l’ouvrage dirigé par la politiste Sophie Béroud et le sociologue Paul Bouffartigue.
Cette riche exploration du processus de précarisation dans le monde du travail et des formes de résistance organisées par les collectifs de salariés interpelle le mouvement syndical dans son ensemble. Ces études n’ont certes pas la prétention de couvrir l’ensemble des contextes de la dégradation contemporaine du travail et des luttes qu’elle suscite, mais elles montrent qu’un modèle d’action et d’engagement syndical est en jeu face à un workfare en place avec le RSA, la « rupture conventionnelle » et la notion « d’offre raisonnable d’emploi ».

Idées
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