De quels droits ?/ La vidéosurveillance, vous dis-je !

Christine Tréguier  • 24 décembre 2009 abonné·es

À l’approche des élections régionales, Nicolas Sarkozy en revient aux bons vieux arguments sécuritaires qui ont fait son succès. Problème, malgré une bonne vingtaine de lois sécuritaires et moult plans de lutte contre la délinquance précoce ou contre la récidive, le bilan de son action en la matière n’est guère probant. Il sort donc sa botte de Nevers la vidéosurveillance, et a profité d’une table ronde sur la sécurité, qui s’est tenue fin novembre en banlieue, pour faire l’apologie de ce remède miracle. « Tous les endroits où la vidéosurveillance a été installée ont vu une progression spectaculaire de la sécurité » , a-t-il affirmé. Une vision toute personnelle puisque le très controversé rapport sur l’efficacité de la vidésurveillance, commandité pour convaincre les élus d’installer davantage de caméras, ne leur concède au mieux qu’« un impact significatif ».

Qu’on se le dise, la vidéosurveillance est la solution à tous les maux. Aux chefs d’établissement scolaire qui s’inquiètent de l’augmentation de la violence, il promet une prompte sanctuarisation : « Dans tous les établissements où il y a des problèmes de sécurité, on met de la vidéo, ça fait de la prévention et, en cas d’intrusion, ça permet aux magistrats d’avoir des preuves sur le modus opératoire. »
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Aux buralistes qui se plaignent de l’insécurité aux abords de leur commerce, il rappelle qu’on va tripler le nombre de caméras dans l’espace public et que l’État a mis 20 millions d’euros sur la table pour ce faire. Les élus réfractaires qui préféreraient investir les deniers municipaux ailleurs sont prévenus. La future loi d’orientation et de programmation pour la police et la gendarmerie (Loppsi), qui doit être discutée au début de l’année prochaine, prévoit qu’en cas de refus d’un maire d’installer de la vidéosurveillance sur son territoire, le préfet pourra se substituer à lui. Perfide, le président en campagne les met même au défi : *« Ceux qui sont contre peuvent me demander de retirer les caméras. Mais qu’ils le disent aux Français. Il va y avoir des élections régionales, que ce soit un moment de débat. Tiens, si on est élu, qu’ils aient le courage de dire : on enlève toutes les caméras. On va voir le succès qu’ils auront. »

Sarkozy promet également une sécurité maximale dans les transports : « Tout wagon acheté par la RATP ou SNCF sera équipé de six caméras. Toutes nos gares seront équipées avec des caméras. » Et de rappeler son admiration pour l’Angleterre, qui, selon lui, disposerait de 20 millions de caméras, lesquelles auraient permis « dès le lendemain » des attentats de Londres, en 2005, d’identifier les coupables. Vérification faite, le chiffre estimé communément admis est de 4,2 millions. Et si les caméras ont bien permis de repérer les véhicules ayant servi aux poseurs de bombe, ceux-ci ne seront identifiés que dix jours plus tard grâce aux documents retrouvés, entre autres, dans les véhicules. Mais notre big brother n’en est pas à une approximation près. Et qu’on ne lui parle pas d’atteintes à la vie privée, il ne « comprend pas cette polémique ».

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