NPA : le making-off

Camille de Casabianca a filmé les préparatifs de la création du Nouveau Parti anticapitaliste.

Denis Sieffert  • 28 janvier 2010 abonné·es

Que faut-il jeter ? Que doit-on garder ? C’est par cette interrogation hautement symbolique que débute C’est parti , le film de Camille de Casabianca. Nous sommes dans les locaux de la Ligue communiste révolutionnaire, au printemps ou à l’été 2008, et des militants balancent par les fenêtres des tombereaux de papiers et d’étagères qui vont se fracasser dans une benne au pied de l’immeuble. Un déménagement ? Pas seulement. La fin d’une histoire et le début d’une autre. La vieille LCR vit ses dernières semaines. Le futur Nouveau Parti anticapitaliste est en gestation. En filigrane, la question de l’héritage. François Sabado, l’un des « vieux » de la LCR, trouve un cahier de comptes rendus du bureau politique des années 1980.

Impossible de jeter ça ! Olivier Besancenot ironise : « N’en profitez pas pour jeter les œuvres complètes de Lénine. » « Est-ce que ça va rebondir ? » , se demande, inquiet, Pierre-François Grond en guettant l’atterrissage de vieilles planches dans la benne. Question éminemment politique…
La caméra de Camille de Casabianca se promène dans les coulisses du futur NPA, depuis les premières réunions des comités constitutifs du nouveau parti jusqu’au congrès fondateur de février 2009, en passant par la dernière université d’été de la LCR, à Port-Leucate, au mois d’août précédent, et par la Fête de l’Huma, où elle s’attarde sur le seul débat véritablement politique du film. Ironie du sort, c’est l’un des trois fondateurs de la LCR, Henri Weber, devenu sénateur socialiste, qui exprime la critique la plus virulente contre ce mouvement trotskiste « qui refuse tout compromis et toute alliance ». S’ensuit un échange musclé avec Sabado. Seul moment de substance politique dans un film dont le parti pris (ou le parti non pris) est de montrer plus que d’expliquer.

La réalisatrice nous fait partager les interrogations des dirigeants : quelle place réserver à Olivier Besancenot dans ce NPA tout neuf ? Qui peut se prévaloir de la légitimité de la parole dans un mouvement qui n’existe pas encore ? Comment ne pas voler la parole aux jeunes ? S’il devait y avoir une vedette dans ce film, ce serait assurément le jeune Abdel, d’Avignon, grande gueule sympathique, prompt à chambrer les anciens. Au-delà de la gouaille du personnage, il y a ses questions, sur la religion notamment. Des questions qui symbolisent l’éveil d’une génération, d’origine maghrébine souvent, qui n’a pas été nourrie au lait du marxisme.
Le film de Camille de Casabianca, qui sort le 10 février en salle, est un documentaire honnête, rythmé et non dépourvu de sens. Plusieurs des « acteurs » le disent : la création du NPA est un processus. Il n’est jamais facile de capter un « processus ». Sur le ton de l’anecdote, ce film y parvient.

Politique
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