Quand la protection de la nature sauve des vies

Dans la réserve naturelle de Lilleau des Niges, au nord de l’île de Ré, aucune construction n’est autorisée. La tempête Xynthia n’y a donc fait aucune victime humaine.

Claude-Marie Vadrot  • 22 avril 2010 abonné·es

En équilibre instable sur une digue tant bien que mal réparée du Fier d’Ars de l’île de Ré, Bruno Toison, délégué régional du Conservatoire du littoral Pays-de-Loire et Poitou-Charentes, et Julien Gernigon, garde technicien de la réserve naturelle de Lilleau des Niges, contemplent les dégâts. Ils craignent que les fragiles réparations ne résistent pas aux fortes marées de la fin du mois d’avril. Toutes les réserves de la Ligue pour la protection des oiseaux dans la région, tous les espaces achetés par le Conservatoire du littoral ont été submergés et dévastés, et la plupart des animaux ont péri noyés. Mais, comme le souligne Bruno Toison, il n’ y a « pas une seule victime humaine, parce que la protection attachée à ces territoires empêche que l’on y construise. Nous avons fait raser les quelques maisons qui y restaient, les gens ayant été indemnisés. La protection de la nature a permis de sauver des vies humaines. Ce qui m’amène à répéter que jamais, au grand jamais, la péninsule d’Arcay de La Faute-sur-Mer n’aurait dû être couverte de constructions. Il y a longtemps, le Conservatoire l’a dit, mais nous n’avons pas été entendus et nous n’avons pu acheter que la Pointe d’Arcay. »

Ils racontent la lutte permanente contre des élus et les milieux de l’immobilier. Ceux qui, autrefois, rêvaient de faire du Fier d’Ars une immense marina. Ceux qui possèdent encore un terrain contigu aux espaces protégés, dans lequel ils veulent construire un port de plaisance près des Portes-en-Ré et des résidences secondaires ou principales. L’un et l’autre déplorent que nul ne leur vienne en aide pour reconstruire la digue alors qu’elle protège la réserve, les paludiers qui exploitent le sel et une partie de Portes-en-Ré. Commentaire de Bruno Toison : «  Personne n’est responsable ou propriétaire des digues alors qu’elles sont sur le domaine public maritime. Ici et ailleurs, du côté de la centrale du Blayais, par exemple, nous avons du mal à trouver des “services responsables”, chacun renvoyant la balle aux autres. »
Ils redoutent les grandes marées à venir, bien qu’en cas de nouvelle catastrophe, « le mois prochain ou dans dix ans » , il n’y aura pas plus de victimes humaines. « Il faut admettre la réalité, conclut Bruno Toison, la mer monte inexorablement, et il faut faire avec ce nouveau risque qui s’ajoute aux anciens, puisque tous les territoires inondés de l’île de Ré ont déjà été submergés en 1940. »

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