Courrier des lecteurs 1108

Politis  • 24 juin 2010 abonné·es

Quelle équipe de France ! Une inefficacité déconcertante, des bévues à tout bout de champ, une tendance fâcheuse à l’insulte, de l’arrogance, des salaires trop élevés… Les Français n’en peuvent plus, les Français en ont marre ! Pardon ? Vous me parliez d’Anelka et de Domenech ? Non, j’évoquais la piètre prestation de l’équipe gouvernementale conduite depuis trois ans par Nicolas Sarkozy.

Jean-Jacques Corrio (13)


Appel du 18-Juin version 2010 par les Bleus

Françaises, Français,
Votre tristesse est immense à la suite de la défaite de votre équipe nationale. Mais nous vous le disons, camarades : nous avons perdu une bataille sur le terrain, pour mieux gagner un autre combat, dans la rue, celui de la réforme des retraites.

Nous avons subi un double électrochoc ces derniers jours : d’abord, en visitant des townships voisins de notre palace doré 5 étoiles : il y a plein de Sud-Africains qui vivent dans la misère, c’est une honte, ils jouent au ballon avec des boîtes de sardines ! Ensuite, quelques heures avant le coup d’envoi du match, nous avons pris connaissance du projet gouvernemental. Quand le chef de l’État a annoncé qu’il était favorable au recul de l’âge légal de départ en retraite, nous avons pris une décision importante : nous, on la prend, notre retraite, dès la fin des éliminatoires de la Coupe du monde, le 22 juin au soir [^2] (on laissera gagner les Sud-Africains, c’est normal, ce sont nos hôtes).
Le 23, nous plions bagages et, le 24, nous serons à vos côtés dans les rues pour fêter la (future) victoire.
Contrairement à 1998, nous n’irons pas aux Champs-Élysées mais du côté de République-Bastille-Nation.
Le gouvernement comptait sur le football pour endormir le peuple de France avec « du pain et des jeux » ? C’est raté, 1-0 !
Les forces de l’argent voulaient éloigner le peuple de France des préoccupations de justice sociale : c’est raté, 2-0 !
Le 24 juin était attendu comme la démonstration de l’incapacité du peuple de France à se mobiliser ? Nouvelle erreur. Et 1, et 2, et 3-0 !
Tous ensemble, tous ensemble, tous !

M. Masson


L’école française, l’école de la République, l’école de l’égalité ?
Quelle belle illusion que les nouvelles mesures du gouvernement font mentir chaque jour un peu plus, donnant un peu plus de crédit aux études Pisa [ Programme international pour le suivi des acquis des élèves, NDLR], qui placent l’école française comme une des plus discriminatoires d’Europe. Parmi celles qui furent passées malheureusement sous silence, retenons un nouveau calendrier des procédures d’orientation pour les élèves de troisième de l’académie de Créteil. Quelles sont les motivations du rectorat de Créteil pour définir ce calendrier, alors qu’il demeura inchangé dans les autres académies ?

En effet, les élèves souhaitant aller en seconde professionnelle ont pris connaissance de leur affectation le 3 juin, c’est-à-dire bien avant la tenue des conseils de classe du troisième trimestre, désormais considérés comme une simple chambre d’enregistrement. Des diktats administratifs semblent décider de l’avenir de l’élève sans réellement se soucier de son choix puisqu’un certain nombre d’élèves souhaitant aller en seconde professionnelle et ayant des résultats tout à fait honorables se virent refuser leur choix. Cette orientation apparaît déshumanisée et se fait sans se soucier des vœux des familles, des élèves et des professeurs. C’est une orientation obligée vers la seconde GT [ générale et technique, NDLR] au détriment de la seconde professionnelle, qui pâtit de son image dégradée. Quels sont donc les critères retenus pour orienter les élèves ?

Cette mesure est profondément injuste. Ne pas considérer le troisième trimestre dans les résultats des affectations engendre une iniquité parmi les élèves. Notre public comprend des élèves connaissant de lourdes fragilités scolaires, un troisième trimestre leur est indispensable pour progresser pleinement et obtenir l’orientation qu’ils souhaitent. Il semble absurde de vouloir revaloriser la filière professionnelle si les élèves subissent leur orientation plus qu’ils ne la choisissent.

Une école aspirant à l’égalité des chances ne peut remplir ses rôles que s’il existe un dialogue entre équipes pédagogiques, familles et jeunes. Sans cette alliance, toute tentative d’orientation réfléchie est vouée à l’échec. Précipiter le choix de l’orientation (les dossiers ont été envoyés début mai), c’est refuser de prendre pleinement en considération les aspirations des élèves, c’est ôter toute cohérence pédagogique à l’enseignement des professeurs, pour qui l’année se déroule sur trois trimestres, c’est vider l’enseignement des apprentissages mis en place sur l’année scolaire. Comment est-il possible d’envisager un remodelage des rythmes scolaires si l’avenir même des élèves n’est pas pris en considération ? Une fois de plus l’intérêt des élèves se trouve bafoué du fait de coupes budgétaires.
Cela va de pair avec le démantèlement des CIO (centre d’information et d’orientation) et le remodelage du rôle des conseillers d’orientation-psychologues [voir Politis n° 1107, NDLR]. Ces derniers ne seraient désormais habilités qu’à intervenir auprès d’élèves handicapés, décrocheurs ou prenant part à un dispositif particulier. Les principales victimes de cette réforme seront encore les élèves, et plus particulièrement ceux issus des classes populaires, pour qui une information gratuite et objective sera plus difficilement accessible. Le fait que l’État se désengage du financement des CIO marque la fin d’un service public amené à être remplacé par des organismes privés qui factureront à coût élevé leurs « conseils » pour l’orientation des élèves.

Si ces réformes convergent vers une volonté de gagner du temps
– pour orienter les élèves – ou de l’argent – en supprimant des postes de professeurs, des conseillers d’orientation-psychologues et des CIO –, elles nient ce qu’est l’école publique, à savoir une école destinée à offrir un enseignement et une large culture quel que soit le niveau social de l’élève, une école destinée à gommer les inégalités si criantes, une école destinée à faire de chaque élève un citoyen conscient du monde dans lequel il vit, une école destinée à aider l’élève à choisir son avenir, à être maître de ce dernier.

Les professeurs du collège
Paul-Bert, Drancy (93)


Je voudrais faire un commentaire sur la tribune « Voiles noirs, masques blancs » parue dans le n° 1107 de Politis.
Je la trouve particulièrement réductrice, et ridicule. Presque deux pages pour terminer en lançant le mot « racisme » en conclusion au débat sur le port du voile, burqa ou autre hijab, c’est très réducteur.
Le mot est tombé comme une sentence ; racistes, vous n’êtes que de vulgaires racistes. Comme si cette condamnation pouvait faire taire tous ceux qui osent critiquer et s’opposer au port vestimentaire avilissant lié à la religion musulmane en prétextant qu’on n’exprime pas la même opposition à l’encontre de la dictature de la beauté qu’on impose aux femmes qui vivent en Occident.

Hugues Domergue


Dans sa lettre parue dans « Le point de vue des lecteurs » du n° 1107 de Politis, Jérôme Desquilbet cite Jacqueline Fraysse, qui avait répondu à une interview dans le numéro précédent : « En même temps émergent, notamment hors des partis, des forces qui mettent en cause cette société. Des forces qu’il est urgent et impératif de rassembler sur des bases communes… » Il est bien écrit « rassembler ». Or, tout votre courrier ne parle que d’organiser, d’organisations. Vous écrivez neuf fois ces mots sans parler une seule fois de « rassembler ». C’est à mon avis un détournement de sens.

Georges Fauvel

[^2]: Ce courrier nous est parvenu le 18 juin.

Courrier des lecteurs
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