« Pourquoi pas 69 ans tant qu’à se faire baiser ! »

En se servant de la jeunesse comme alibi pour mener sa réforme, le gouvernement lui a lancé un défi. Et ce défi, elle a décidé de le relever.

Pierre Duquesne  • 14 octobre 2010 abonné·es

Bien qu’ils soient loin de la retraite, les jeunes sont en première ligne dans le combat sur les retraites, qu’ils soient ou non manifestants. « Cette réforme, c’est leur réforme , a lancé Luc Chatel, ­­mi­nistre de l’Éducation nationale et porte-parole du gouvernement. Nous la faisons pour eux, […] pour qu’ils n’aient pas à payer deux fois la retraite, la retraite de leurs parents et la retraite de leurs grands-parents. »

Les lycéens l’ont pris au mot. « L’enjeu à court terme, c’est l’emploi des jeunes , s’insurge Julianne Charton, de l’Union nationale lycéenne. Cette réforme inégalitaire met 1 million de jeunes au chômage. Si on l’accepte, on va être précaires dans les études, précaires dans l’emploi et précaires à la retraite. » Tout juste entré en seconde, Paul ne possède ni l’art du slogan ni mégaphone. Mais un indéniable sens logique : « Après la retraite à 67 ans, dans dix ans, ils vont nous la ­mettre à 70 ans ! Et après, 80 ans ? Si on cède maintenant, on va être soumis » , détaille ce lycéen aux traits de chérubin devant Victor-Duruy, premier lycée bloqué à Paris. « La retraite à 67 ans ? Pourquoi pas 69, tant qu’à se faire baiser ! » , lisait-on dans une manif toulousaine.

« Dans les dernières luttes étudiantes, comme celle sur la LRU, par exemple, l’Unef s’est toujours raccrochée aux ­mouvements lancés par d’autres. Sur les retraites, c’est différent » , constate Adrien, sympathisant du NPA de l’université Paris-I. Dès le jour de la rentrée, l’Unef, SUD Étudiants et la Fédération syndicale étudiante, membres du collectif unitaire « La retraite, une affaire de jeunes », ont inondé la fac de tracts, redoublant les craintes de l’Élysée : « Il faut à tout prix éviter la mobilisation des jeunes. Étudiants et lycéens doivent être surveillés comme le lait sur le feu. » Attribuée à Nicolas Sarkozy, cette phrase a été souvent reprise en assemblée générale à Tolbiac. Elle est, peut-être, le meilleur ressort pour les mobiliser.

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