Cuisiner la révolution

Un montage facétieux de textes sur le besoin d’utopie. Tonique.

Gilles Costaz  • 13 janvier 2011 abonné·es

L’auteur Jean-Charles Massera et le metteur en scène Benoît Lambert se sont dit : si on remettait les idées de révolution sur la table ? Ils les ont jetées sur une table de cuisine pour leur nouveau spectacle Que faire ? (le retour), dont le titre fait référence à Lénine. Donc tout commence dans une cuisine où dîne un couple des classes moyennes. La femme lit en mangeant. Rien ne lui fait peur, elle dévore même du Descartes en latin. Brave garçon, le mari apporte un paquet de bouquins où il y aura de tout : Marx, Maupassant, Flaubert, Vaneigem, Deleuze disant que la France se refusait à analyser l’héritage de Mai 68… Nos deux Français moyens se mettent à picorer. Ils tanguent sur une mer de livres, s’enlacent, se projettent en furieux militants, se dédoublent. Dans une série de secousses, ils vont de l’utopie à la réalité, de la réalité à l’utopie. Ils lisent à voix haute, chantent Mouloudji et Anne Sylvestre. Ne vont-ils pas finir par fabriquer des cocktails Molotov en se passant la chanson de Trénet Quand votre cœur fait boum ?

C’est une facétie qui fuit le didactisme mais rappelle des œuvres essentielles. Par le rire, le délire, les dérives d’un bateau ivre, Massera et Lambert administrent une sacrée série de piqûres de rappel. Martine Schambacher et François Chattot sont de formidables acteurs de chair et de rêve dans ce montage démonté et tonique.

Culture
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