Quand le Crif manipule BHL

Bernard-Henri Lévy, tout comme Alain Finkielkraut, a démenti avoir apporté son appui au président du Crif quand celui-ci a exigé l’annulation d’un débat sur la campagne BDS à l’École normale supérieure.

Denis Sieffert  • 3 février 2011 abonné·es

L’affaire, décidément, n’en finit pas de faire des vagues. La décision prise par la directrice de l’École normale supérieure, Monique Canto-Sperber, d’interdire dans l’enceinte de l’école un débat sur la campagne « Boycott, Désinvestissement, Sanctions » (BDS), auquel devaient prendre part notamment Stéphane Hessel et Leila Shahid, a eu pour effet, on s’en souvient, de donner à cette manifestation une audience qu’elle n’aurait jamais eue sans cet acte de censure. Mille cinq cents personnes ont pris part, le 18 janvier, à cette réunion qui s’est finalement tenue sur la place du Panthéon.
Mais l’origine des pressions qui se sont exercées sur Mme Canto-Sperber continue de faire polémique. Le président du Crif s’est vanté dans un éditorial d’avoir exigé cette interdiction auprès de la ministre de l’Éducation nationale, Valérie Pécresse, qui aurait obtempéré. Notons au passage que Richard Prasquier semble fier de l’effet désastreux que peut avoir sur l’opinion l’image d’un groupe de pression tout-puissant auprès du gouvernement. Mais il y a plus étonnant encore : pour obtenir gain de cause, le président du Crif s’est prévalu de l’appui de plusieurs personnalités, dont Alain Finkielkraut et Bernard-Henri Lévy. Or, l’un et l’autre viennent d’adresser à Richard Prasquier un démenti sans équivoque.

« Je rentre des États-Unis , écrit notamment BHL au Nouvel Observateur , et j’apprends qu’un débat autour de l’opération BDS a été annulé à l’École normale. Contrairement à ce que laisse entendre votre site, je ne suis intervenu ni auprès de Madame Canto-Sperber ni auprès de quiconque pour recommander l’annulation de ce débat. Je suis, par principe, même et surtout quand le désaccord est profond, partisan de la confrontation des points de vue – pas de leur “annulation” [^2] »

Ainsi, Richard Prasquier aurait tout bonnement usurpé la signature de BHL. Un seul regret : si les noms des deux « ex-normaliens » ont à présent disparu de l’éditorial du président du Crif, c’est en toute discrétion. BHL n’est pas allé jusqu’à exiger la publication de son démenti sur le site du Crif. Outre les méthodes de Richard Prasquier, nous retiendrons de cette affaire que BHL est partisan de « la confrontation des points de vue » sur la campagne BDS. Il ne reste plus qu’à organiser le débat. Et pourquoi pas… à l’ENS ?

[^2]: Démenti publié uniquement sur http://www.nouvelobs.com.

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