L’amour comme champ de bataille

Un diptyque Strindberg-Schiaretti réussi à la Colline.

Gilles Costaz  • 19 mai 2011 abonné·es

S’il y a un artiste de théâtre français qui a dominé la saison par son engagement et son sens des prouesses, c’est Christian Schiaretti. Le directeur du Théâtre national populaire de Villeurbanne aura présenté deux énormes diptyques dans la saison. D’une part, un ensemble Siècle d’or espagnol avec une admirable Célestine de Rojas jouée par Hélène Vincent et le Don Juan de Tirso de Molina. D’autre part, un doublé Strindberg, qui vient d’arriver à la Colline. Ce second diptyque est également réussi, car Schiaretti possède à la fois le sens du jeu charnel et celui du hiératisme du théâtre. Avec lui, même si la soirée est un éclat de rire ou un jeu de massacre, le moment vécu est toujours une cérémonie.

Sa Mademoiselle Julie bénéficie d’une interprète tout à fait brûlante, Clémentine Verdier. Créanciers – un record de misogynie à l’intérieur du répertoire mondial – est joué par Clara Simpson et Christophe Maltot avec un sens très aigu de l’imbrication de la passion et du code social. Dans les deux pièces, Wladimir Yordanoff prend en charge l’un des rôles principaux, et sa métamorphose, tout en nuances, est impressionnante : il affronte pourtant la pire des partitions, faite d’une détestation féroce des femmes. On entend comme de nouvelles vibrations dans ces deux classiques, terriblement lourds de haine et de désespoir.

Culture
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