Ralliements de dernière minute

Denis Sieffert  et  Christophe Kantcheff  et  Jean-Claude Renard  • 28 juillet 2011 abonné·es

Illustration - Ralliements de dernière minute

Au cours des premiers mois, il avait fallu jauger la sincérité des ralliements. Mélenchon et Duflot avaient eu très vite l’embarras du choix. Seules les offres de services d’Arnaud Montebourg et de Benoît Hamon leur avaient semblé dignes d’intérêt. Le premier fut d’ailleurs nommé garde des Sceaux. Les tentatives appuyées de Rama Yade, de Fadela Amara et même d’Éric Besson, qui rappelaient à qui voulait l’entendre qu’ils avaient « toujours été de gauche », sont restées sans lendemain. Au mois d’août, Manuel Valls fit sensation en prônant, dans un entretien à Tous ensemble, le journal du NPA, l’ouverture des prisons : « Il faut désengorger le système pénitentiaire, déclara-t-il, et ne maintenir derrière les barreaux que les serial killers. » Il eut même cette formule définitive : « Une société qui emprisonne est une société qui s’emprisonne. » Une trouvaille qui, disait-on, lui avait été facturée très cher par Euro RSCG. Quelques jours plus tard, il récidiva en demandant que tous les policiers opèrent désormais en civil. « Non pour les dissimuler, précisa-t-il, mais pour les réintégrer en profondeur dans la société. » À Matignon, on reçut ces idées avec un fort scepticisme. « Au fond, fanfaronnait Mélenchon, c’est peut-être ça, la révolution citoyenne : un truc qui a réussi à faire de Valls un gauchiste ! »



Un autre ralliement, plus sérieux, vint d’une partie du NPA. Nouvelle porte-parole à l’issue d’un congrès extraordinaire, Myriam Martin se prononça pour un soutien critique du gouvernement. Les Alternatifs, de leur côté, lancèrent l’appel de Vouarces, un village de 97 habitants, dans la Marne, où ils avaient tenu leurs assises dans une ferme bio. Ils ne s’y prononçaient pas ouvertement pour un soutien à la nouvelle majorité, mais ne l’excluaient pas non plus. Au cas par cas. Ou le contraire. Du côté de Lutte ouvrière, pas question de ralliement : « On ne nous refera pas le coup, avait déclaré Nathalie Arthaud, les travailleurs voient bien que derrière Anémone, c’est le Grand Capital qui tire les ficelles. » Et il fallait compter aussi avec l’incrédulité de certains internautes, alimentée par des réseaux plus ou moins bienveillants. L’un d’entre eux, coutumier du fait, développa la thèse du complot : Anémone, consciente ou non, était manipulée par la CIA. Le site en question avait enquêté sur le passé « on ne peut plus trouble » de la Présidente. Pourquoi avait-elle vécu toute une année au Costa Rica ? Pays bien connu pour être un lieu de villégiature des Yankees. Interrogée à ce sujet, Anémone avait habilement répondu : « Au lieu de poser des questions stupides, on ferait bien de s’inspirer de ce petit pays qui a eu le courage de supprimer son armée. » À ce propos, la Présidente avait bien essayé d’imposer cette idée à ses deux partenaires. Pensez donc ! 31,2 milliards d’euros d’économie pour 2013, ça n’était pas négligeable ! Les Verts étaient plutôt pour. Mais ça résistait dur du côté de chez Mélenchon, et surtout au Parti communiste…

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