À flux détendu

Christophe Kantcheff  • 13 octobre 2011 abonné·es

Penser à la nuée de mots, d’images et de sons qui nous environne est vertigineux. Beaucoup d’entre eux nous ciblent… heureusement sans nous atteindre ! Surtout si, par instinct de défense, on cherche à les éviter. Mais, parfois, jouer au sémiologue, comme nous y invitait ici même Jean-Pierre Darroussin la semaine dernière, ne s’avère pas superflu.

Arrêtons-nous, par exemple, sur la publicité de rentrée concernant l’information sur France Télévisions : « Des infos justes et pas juste l’info » . Ça promet du solide, du sérieux, de l’info qualité supérieure. On a presque de la gêne à faire remarquer toutefois que cette pub est une démarque d’un autre slogan, archi-célèbre celui-ci, signé Jean-Luc Godard : « Ce n’est pas une image juste, c’est juste une image. » À ceci près que France Télévisions a renversé la proposition. Dommage.

D’abord parce que, dans ce « juste une image » , il n’y a pas d’appréciation de valeur. Revendiquer « des infos justes » ou « une image juste » , c’est se hausser du col, se dresser sur ses ergots. Se décerner un label de vertu qui, par là même, en devient presque suspect. Ensuite, et surtout, parce que le « juste une image » remet à sa place ce dont il s’agit. Ce qui se présente n’est pas la réalité, encore moins la vérité. Non, c’est « juste une image » . À considérer pour ce qu’elle est : un point de vue, une représentation à confronter avec d’autres, à prendre avec des pincettes, à regarder (au moins) à deux fois.

Pourquoi France Télévisions a-t-elle jugé nécessaire de renverser la proposition godardienne ? Par manque de confiance dans les capacités du télespectateur à décrypter un slogan ? Pour ne pas encourager celui-ci à trop d’esprit critique ? Ce n’est pas une question juste, c’est juste une question.

Culture
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