À flux détendu

Christophe Kantcheff  • 22 décembre 2011
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Il est là, tout à droite, sur la fameuse photographie prise en 1959 où figurent les écrivains du « Nouveau Roman » et leur éditeur, Jérôme Lindon. On voit Alain Robbe-Grillet, Claude Simon, Claude Mauriac, Robert Pinget, Samuel Beckett et, à côté de Nathalie Sarraute, Claude Ollier. Claude Ollier ? De tous, il est le seul à être encore vivant et à continuer à publier, à 89 ans. Claude Ollier, écrivain des confins de la perception, explorateur de sensations non reconnues, est de la dimension des plus grands d’entre eux.

Mais, pour un ensemble de raisons qui seraient à la fois compliquées et passionnantes à démêler, Claude Ollier est aujourd’hui un écrivain oublié, non lu, écarté de la scène littéraire et médiatique. Dans la presse, plus aucune ligne ne s’écrit sur ses livres depuis des années. Un scandale.
Claude Ollier fait paraître aujourd’hui le sixième tome de son journal, Simulacre (251 p., 19 euros), qui couvre les années 2000 à 2009. Le livre est publié par les éditions POL, qui témoignent envers l’écrivain d’une fidélité sans faille.

Simulacre est avant tout un journal sur la création littéraire. Dans ces années, Claude Ollier est notamment en train d’écrire Wert et la vie sans fin (parution 2007), dont il décrit la genèse. Il revient sur certains de ses livres plus anciens, ou raconte la manière dont des étudiants ont appréhendé sans difficultés l’une de ses œuvres les plus complexes, Qatastrophe (2004). Grand lecteur, il fouille chez Nabokov ou Bernhard les mystères de la phrase ou de la composition.

Il relève chez Joyce : « L’artiste reste à l’intérieur, ou derrière, ou au-delà, ou au-dessus de son œuvre, invisible, subtilisé, hors de l’existence, indifférent, en train de se curer les ongles. » Ce n’est pas seulement affaire de discrétion – trait de caractère de Claude Ollier. C’est que, pour lui, l’œuvre primera toujours sur l’auteur.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes
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