Dans la Maison ronde

Augustin Scalbert retrace 50 ans d’histoire de la station, entre pressions et liberté. Sans convaincre.

Jean-Claude Renard  • 19 janvier 2012 abonné·es

Forcément, un livre consacré à France Inter, annoncé dès juin, reporté en fin d’année puis en janvier, ça émoustille. La Voix de son maître ? , d’Augustin Scalbert (journaliste à Rue 89), retrace près de cinquante ans de l’histoire de la station.

En remontant en 1963, à l’inauguration de la Maison ronde, qui « aura toujours, écrit l’auteur, une courroie de transmission, incarnée par la présidence de l’ORTF puis par celle de Radio France, entre elle et le pouvoir » . Pompidou trouve la formule, en 1970 : « L’ORTF, c’est la voix de la France. » C’est l’époque où un téléphone relie directement le ministère à la radio. Les journalistes n’ont pas à se mettre la rate au court-bouillon pour hiérarchiser l’information : le gouvernement s’en charge. Mitterrand rompt la tutelle en 1982. Sans changer grand-chose aux nominations des proches, aux coups de gueule de responsables politiques. Quand même, « la voix de son maître se fait plus lointaine » .

Passé ce préambule historique éclairant, l’auteur traite l’objet principal de son livre : Inter sous l’ère Sarkozy, réactivant la tutelle à travers sa réforme de l’audio­visuel public, en 2008. Et de revenir longuement sur ces dernières années, avec les nominations de Jean-Luc Hees et de Philippe Val. Entre circonstances et conséquences. Scalbert égrène les premières décisions de Val (l’éviction de Frédéric Pommier de la revue de presse, la suppression brutale de 30 minutes du 5/7), le traitement de faveur de ses amis à l’antenne (BHL, Daniel Leconte, le couple Badinter), ses idées pro-israéliennes. Jusqu’au renvoi de Porte et de Guillon, insérant de larges extraits de leurs chroniques les plus polémiques.

Au fil des anecdotes, l’auteur souligne les tensions et les pressions habillant la Maison ronde, s’appuyant sur des témoignages « sous couvert d’anonymat » (leitmotiv du livre), à l’exception de Thomas Legrand, Jean-François Achilli, Daniel Mermet, toujours en poste et qui, au reste, écartent toute polémique. Si Hees et Val ont refusé de s’exprimer, des anciens d’Inter témoignent (Nicolas Demorand, Jacques Kessler, José Artur, Claude Villers), mais, là encore, sans être tranchants.

In fine, le livre est un bon résumé d’hier à aujourd’hui, mais sans révélation majeure (a fortiori pour le lecteur ou l’auditeur averti). Où l’on n’apprend rien sur l’interventionnisme ni sur les amitiés ou les inimitiés. Où rien n’est dit sur la politique éditoriale de la station. Est-il utile de rappeler en six pages l’irrévérence du « Tribunal des flagrants délires », d’évoquer en détail les chroniques libérales de Jean-Marc Sylvestre ? Et faut-il encore s’étonner, avec l’auteur, de la « conversion radicale de Philippe Val » , laquelle « a surpris tout le monde »  ?

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