Le double scandale de l’amiante

La cour d’appel de Douai a condamné des victimes
à rembourser une partie des indemnités perçues.

Thierry Brun  • 31 mai 2012 abonné·es

L’amiante, véritable bombe à retardement pour la santé… et pour les victimes indemnisées. La cour d’appel de Douai a siégé le 24 mai dans une affaire opposant 37 victimes de l’amiante au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva). La décision a été mise en délibéré au 28 juin, mais, lors d’un précédent jugement, 57 personnes ont déjà été condamnées à rembourser une partie de leurs indemnités versées par le Fiva, et la cour ne devrait pas se contredire.

Pourquoi cet imbroglio ? Le montant des indemnités des victimes de l’amiante avait été doublé en 2008, à la suite d’une décision de la même cour de Douai. Mais le Fiva, organisme placé sous la tutelle du ministère de la Santé, a mené une bataille contre ce jugement et obtenu gain de cause devant la Cour de cassation en novembre 2009. C’est donc ce « trop-perçu » qui est aujourd’hui réclamé aux victimes : des sommes pouvant aller de 3 000 à plus de 28 000 euros, selon l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva).

L’acharnement du Fiva a suscité une motion demandant que celui-ci renonce aux poursuites et propose une remise gracieuse pour les condamnés. Cette motion a été signée en début d’année par 412 parlementaires, dont François Hollande, Jean-Marc Ayrault et Marisol Touraine, nouvelle ministre de la Santé.

L’Andeva et la Fédération des accidentés de la vie (Fnath) dénoncent un « harcèlement judiciaire » et parlent de « dérive inacceptable de la direction du Fonds dans son attitude à l’égard des victimes et dans la gestion désastreuse des dossiers d’indemnisation ». L’Andeva reproche au Fiva un fonctionnement dégradé : *« Les délais de traitement des dossiers s’allongent, les dysfonctionnements se multiplient. Le nombre des victimes qui décèdent avant d’avoir reçu une offre augmente. Au lieu de redresser la barre, la direction du Fiva s’acharne sur des victimes ».
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L’association pointe aussi une justice à deux vitesses. Elle demande au gouvernement de revoir les dispositions du code pénal « afin de mieux qualifier de tels désastres et d’infliger des sanctions appropriées à leurs auteurs. À Turin, la justice italienne a condamné deux hauts responsables d’Eternit. Ce qui est possible en Italie doit l’être en France ».