Bonus pour voitures « vertes » : l’escroquerie écologique, sociale et statistique d’Arnaud Montebourg

Les effets du « bonus » ne concerneront que quelques milliers de voitures par an alors que les immatriculations stagne autour de 2,8 millions de véhicules chaque année.

Claude-Marie Vadrot  • 27 juillet 2012
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Ainsi donc, pour que nous adoptions une attitude plus responsable, à condition que l’on considère qu’à terme les véhicules électriques méritent le qualificatif d’« écologiques », l’Etat va payer encore plus les automobilistes pour qu’ils adoptent une attitude considérée comme socio-écologique. En prélevant plus d’un demi milliard d’euros (par an) sur le budget de pays. C’est cela le bonus : continuer à nous persuader que sans voiture, point de salut. Je sais, lecteurs grincheux habituels, vous m’objecterez que dans les zones rurales et les banlieues lointaines, la bagnole est le seul recours possible. Oui, sans aucun doute, mais, sur 38 millions de voitures, le total de celles qui sont utilisées par les citadins, ceux des grandes agglomérations, est largement supérieur à celui des véhicules ruraux imposés par les prix des terrains qui éloignent des centre-ville, par la défaillance des transports publics et par les urbanisations anarchiques des grandes banlieues.

Quand aux véhicules électriques, si par hasard leurs achats augmentaient par miracle de 200% l’année prochaine, cela aboutirait au chiffre mirifique de 10 400 voitures (achetées) par an. Appliqué au aux véhicules hybrides, le même raisonnement prospectif miraculeux, entrainerait, toutes marques confondues, la vente de ces voitures écologiques, (selon Montebourg) à 53 132 par an. Hypothése qui n’a aucune chance de se réaliser.

Donc, sans oublier que même avec le « bonus » ces bagnoles sont plus chères à l’achat, le « plan » mirifique concernerait environs 60 000 engins sur les 2, 8 millions immatriculés en France chaque année. Soit à peine 2%. Pas de quoi sauver Peugeot ou Renault, d’autant plus que les deux tiers de ces voitures électriques ou hybrides sont fabriquées hors de France, ce qui améne, dans le cas peu probable d’un bond spectaculaire des achats, à un pourcentage de 0,5 % d’augmentation de vente de marques françaises et 0,2 % de véhicules fabriquées en France.

D’autre part il ne s’agirait pas d’une augmentation du chiffre des ventes mais d’une substitution pour d’autres modèles. Pour une fois, les écolos et les syndicalistes sont d’accord pour crier à l’escroquerie politique, écologique et sociale.

Donc le bonus ne profitera qu’à une minorité de Français plutôt fortunés, les autres ne s’intéressant pas, pour des raisons économiques ou des raisons psychologiques de résistance au changement, aux nouvelles technologies. Un exemple révélateur : un constructeur italien commercialise des scooters MP3 hybrides de 125 cm3, mais en dépit d’un résultat de consommation qui se situe autour de 1, 6 litres au 100 kilomètres (donc au minimum une moindre pollution), il n’en a vendu que 120 en France en trois ans. Pour l’automobiliste français, une moto ou une voiture qui ne font pas « vroum-vroum », ce ne sont pas de vrais véhicules…

Donc le fameux plan d’Arnaud Montebourg n’est qu’une coûteuse poudre aux yeux et les automobilistes français, qui ne font pas le calcul de l’économie illusoire dont ils croient bénéficier, continueront à acheter des véhicules diesel qui représentent 78 % des bagnoles immatriculées en 2011. Economie bidon et pollution, notamment aux particules fines dangereuses pour les poumons, garanties. Mais il n’est pourtant pas question se supprimer la petite détaxation sur ce carburant nocif.

Le calcul du ludion du Redressement Productif vient de nous offrir un tour de passe-passe politico-économique qui n’est qu’une illusion partant, au delà de son aspect illusoire, du principe que pour encourager à la transition écologique il ne faut pas compter sur le civisme des citoyens et qu’il ne faut qu’encourager ceux qui n’ont pas de souci économique en leur offrant une « aide » avec l’argent des contribuables.

Le problème de la mévente des voitures fabriquées en France (comme les autres) n’est en aucun cas résolu puisque le gouvernement n’a pas choisi la solution qui consiste à remettre en cause la suprématie de la voiture individuelles en milieu urbain au profit du développement des transports collectifs et du deux roues, avec ou sans moteur. D’ailleurs, le ministère de l’Economie et des Finances qui rechigne pour financer le grand métro parisien, ne voit aucun inconvénient à dépenser un demi milliard par an pour aider des automobilistes à être vertueux.

Écologie
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