Disparition d’une intransigeante

Catherine Lépront est décédée ce 19 août.

Jean-Claude Renard  • 30 août 2012 abonné·es

Récompensée par le prix Goncourt de la nouvelle pour Trois Gardiennes en 1992, Catherine Lépront n’était pas connue du grand public. Malgré une vingtaine de titres publiés, entre romans, nouvelles, essais. C’est qu’elle ne courait pas les plateaux de télé, ne traînait pas sur la terrasse du Flore. Elle préférait la quiétude d’un bureau, la densité d’une rencontre. Au reste, elle n’accordait pas d’interview, mais une conversation. Dans le charme de la discrétion. Issue d’un milieu médical, d’abord infirmière libérale, elle publiait son premier roman en 1983, le Tour du domaine , chez Gallimard (avant de passer plus tard au Seuil).

Écrivaine politique au sens large, taraudée par la grande Histoire culbutant les petites existences, ses livres évoquent la Shoah et la guerre d’Algérie ( Namokel ), la colonisation et le déracinement ( Josée Bethléem ), le goulag ( le Cahier de moleskine noire du délateur Mikhaïl ), sans s’épargner du tout-venant des vies ordinaires ( Des gens du monde ou encore l’Anglaise, son dernier roman paru en janvier ). Ni de réflexions sur Clara Schumann ou sur le peintre romantique Caspar David Friedrich.

Des textes qui disent le parti pris. Beaucoup s’appuyant sur l’art, les rapports entre les êtres, déployés avec une petite musique toute personnelle. Un style précis, taillé au cordeau, de fugues en variations, de digressions en soliloques hallucinés, un ton corrosif parfois, férocement drôle. Sans concession. Et c’est aussi sans concession qu’elle occupait un poste de conseillère littéraire chez Gallimard.

Culture
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