Des brèches dans l’isolement

Quelques rapprochements entre députés UMP et FN dénotent un changement de climat à droite. Prélude à de futures alliances ?

Michel Soudais  • 7 mars 2013 abonné·es

Mardi 26 février, Marion Maréchal-Le Pen et Gilbert Collard n’assistaient pas à la traditionnelle séance des questions d’actualité au gouvernement. Présents porte Maillot, comme leur collègue Nicolas Dupont-Aignan, afin d’apporter leur soutien aux policiers qui organisaient une marche blanche à la mémoire de leurs deux collègues de la BAC tués sur le périphérique, ils auraient été priés de quitter les lieux selon un des organisateurs. « Faux et faux, assure le président de Debout la République, nous avons été bien accueillis à l’exception d’une personne. » Peu importe la réalité de l’accueil fait aux députés frontistes quand ce « nous » de Nicolas Dupont-Aignan, qui a regretté publiquement l’absence d’élus de la Nation à ce rassemblement, résume toute la banalisation qui se joue à l’Assemblée. « Nous n’étions que trois ! »

Si certains députés empruntent l’escalier plutôt que de croiser les frontistes dans l’ascenseur, Marion Maréchal-Le Pen reconnaît qu’elle « ne souffre pas d’un ostracisme ignoble ». Le 20 février, alors qu’elle était en séance jusque tard dans la soirée pour l’examen du projet de loi modifiant les scrutins locaux, elle tuait le temps en faisant la causette avec deux voisins de travées, les UMP Alain Chrétien, député maire de Vesoul (Haute-Saône), et Claude de Ganay, député maire de Dampierre-en-Burly (Loiret). Quelques applaudissements sur les bancs UMP ont aussi accompagné ses interventions. « De plus en plus, notre travail est respecté et, de ce fait-là, des députés prennent le temps de nous saluer, de discuter avec nous », raconte-t-elle. Simple courtoisie ou accointances politiques ? Les deux cas de figure cohabitent et les jeux parlementaires autorisent parfois de curieux rapprochements. Fin novembre, les trois députés d’extrême droite étaient, avec près de quatre-vingt-dix autres députés de tous groupes (sauf EELV), signataires de deux amendements de l’UMP Jean-Pierre Decool visant à diminuer la hausse des droits d’accise sur la bière. Mais c’est surtout dans le débat sur le mariage pour tous que des liens ont commencé à se tisser. On a vu des UMP accepter que Gilbert Collard signe quatre de leurs amendements visant notamment à instaurer, pour les maires ou adjoints, une « liberté de conscience ». En 1986-1988, c’était déjà sur une question similaire, l’opposition à l’avortement, que des députés RPR, UDF et FN avaient constitué un intergroupe de travail. Le 16 janvier, Marion Maréchal-Le Pen et Jacques Bompard avaient, eux, signé une proposition de loi de Lionnel Luca et cinq élus UMP réclamant la reconnaissance du prétendu « génocide vendéen ». Un premier pas.