La Fille du 14 juillet : Un été libertaire, égalitaire, fraternitaire !

Le premier film d’Antonin Peretjatko est une comédie libre et jouissive.

Christophe Kantcheff  • 6 juin 2013 abonné·es

Le générique de la Fille du 14 Juillet, premier long-métrage d’Antonin Peretjatko, pourrait être vu comme un manifeste politique. Ce sont des images, en accéléré, de Nicolas Sarkozy dans la loge d’honneur du défilé du 14 juillet 2011, puis, l’année suivante, celles de François Hollande dans les mêmes circonstances. L’effet comique de l’accélération des images est renforcé par le fait que les deux présidents effectuent les mêmes gestes au même endroit. Ils sont là clownesques et interchangeables. Ne pas trop surestimer l’aspect politique, cependant, car ce serait se tromper de direction. L’esprit ici est surtout espiègle et potache. Et c’est ainsi que le ton est donné.

Parce qu’elle ne trouve pas de boulot, Truquette (Vimala Pons) décide de partir avec une copine, Charlotte (Marie-Lorna Vaconsin), au bord de la mer. Se joignent à elles Hector (Grégoire Tachnakian), un jeune homme tombé amoureux de Charlotte, le pote de celui-ci (Vincent Macaigne) et le frère libidineux de Charlotte (Thomas Schmitt). Le comique de leurs aventures sort totalement du registre réaliste. Des objets y jouent un rôle important : des mini-guillotines qui coupent pour de vrai, des assiettes à soupe ajourées, des statuettes anciennes du Louvre cassées par un gardien… Le road-movie carbure au burlesque, à l’absurde, au coq-à-l’âne. À la citation aussi : la Fille du 14 Juillet a en cela une dimension postmoderne et ludique, détournant certaines séquences, de Godard, notamment, d’ À bout de souffle en particulier. Le film reprend aussi, de façon explicite, un certain esprit à la Rozier. Et la fin, où les amoureux se cherchent dans un brouillard de fumée, ressemble à celle de The Party, de Blake Edwards, qui s’achevait dans la mousse.

L’une des fortes trouvailles du scénario est d’avoir imaginé que le gouvernement, face à la crise, exige que les gens reprennent le travail plus tôt et avance la rentrée au 1er août, opposant ainsi les aoûtiens, frustrés, aux juillettistes. Alors que la situation du pays se tend, la bande continue son parcours à contre-courant. L’état d’esprit relève moins d’un « je m’en foutisme » que d’une propension à désobéir. C’est la nature du burlesque, du non-sens, que d’enrayer la machine à faire respecter l’ordre des choses. S’ajoute ici une humeur libertaire presque énervée. Si les gags ne sont pas tous gagnants, qu’à cela ne tienne. Leur généreuse profusion, l’inventivité désinhibée dont ils témoignent emportent l’adhésion. La Fille du 14 Juillet pourrait avoir un slogan : « Liberté, égalité, fraternité, foutraque ! »

Cinéma
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