Qui veut suspendre la réforme des rythmes scolaires ?

À Paris et à Aubervilliers, les enseignants réclament le report de la réforme. Des élus de l’opposition s’engouffrent dans la brèche.

Ingrid Merckx  • 10 octobre 2013 abonné·es

La décision fut difficile à prendre. Mais, le 5 octobre, le Snuipp Paris a tranché : le syndicat majoritaire des enseignants du primaire « exige l’arrêt du dispositif » mettant en place la réforme des rythmes scolaires dans la capitale. Les dysfonctionnements sont tels « qu’il n’est pas possible de continuer ainsi pendant toute l’année ». Pas favorable au « statu quo Darcos » – soit la semaine de 4 jours surchargés –, le Snuipp « ne peut se satisfaire du bricolage Peillon/Delanoë ». Le 30 septembre, le syndicat a rendu compte des premiers résultats d’une enquête menée auprès des écoles parisiennes. Sur les 160 réponses recueillies en dix jours (sur 663 établissements), 80 % déploraient anxiété et fatigue (chez les élèves et les enseignants) et 60 % des problèmes inattendus d’hygiène et de sécurité. Le recteur a ainsi accepté de saisir le tout nouveau Comité d’hygiène et de sécurité. « La situation est explosive ! », alerte le Snuipp, témoignages à l’appui : des animateurs qui rendent des enfants à des parents sans les connaître ; des inconnus qui circulent dans les écoles… Début octobre, la rentrée n’est toujours pas terminée, signalent les directeurs d’établissements, dépassés : pas de listes arrêtées d’élèves restant aux ateliers périscolaires, pas de liste d’animateurs ou d’associations intervenants, pas de formation suffisante pour les activités proposées en maternelle…

Paris n’est pas la seule concernée. À Aubervilliers (93), le 3 octobre, 95 % des enseignants étaient en grève contre la réforme des rythmes scolaires, soutenus par les parents d’élèves et les agents municipaux. Devant le manque de réponses du maire, ils ont décidé d’entamer des blocages d’écoles le 7 octobre. La mise en place de la réforme ne se passe pas mal partout, mais dans les villes où elle a été mal préparée, c’est la pagaille. Certains élus y trouvent cependant une occasion de lancer leur campagne pour les municipales. Jean-François Copé, maire de Meaux et porte-parole de l’UMP, a fait de la contre-réforme son nouveau cheval de bataille. Le tract qu’il a lancé avance des arguments que le Snuipp ne renierait pas. Surprenante convergence. « Nous en avons assez de voir cette réforme instrumentalisée », commente Jérôme Lambert, secrétaire général du Snuipp Paris. Des élus commencent à se regrouper en collectif, comme autour de la pétition « contrelaloipeillon.fr », initiée par Jean-Michel Fourgous, maire d’Élancourt (UMP), qui rassemble déjà plus de 20 000 signatures. D’autres poursuivent des processus de concertation plus ou moins démocratiques selon les villes. Les personnels municipaux sont-ils associés à la réflexion ? Les questionnaires remis aux parents seront-ils réellement pris en compte – ou ne serviront-ils qu’à appuyer des décisions déjà prises ? Qui fait la synthèse des bonnes pratiques ? Et si l’on stoppe la réforme aujourd’hui, que se passe-t-il ? Tout le monde revient à quatre jours par semaine, finissant à 16 h 30, en attendant de trouver sa bonne formule ?

Société
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