« Abus de faiblesse » de Catherine Breillat : « Je » est une autre

Catherine Breillat cherche à comprendre comment elle a pu se laisser abuser.

Christophe Kantcheff  • 13 février 2014 abonné·es

Catherine Breillat, victime d’un AVC qui lui a laissé des séquelles, a été escroquée il y a quelques années par un homme qui lui a soutiré 700 000 euros. Cela, c’est la réalité. Ceux qui viendront voir Abus de faiblesse dans l’espoir d’y apprendre des détails croustillants en seront pour leur frais, et c’est tant mieux. Catherine Breillat a tiré de sa mésaventure un film quasi abstrait, elliptique, ce qui en fait un objet mystérieux. Certains types de scènes sont récurrents, qui en donnent la direction. On y voit Maud, interprétée par une Isabelle Huppert très performeuse, au corps plus que jamais torturé, ayant perdu l’équilibre ou souffrante, seule, se débattant à terre pour essayer de se sortir de cette situation – le film s’ouvre ainsi, sans fioritures, sur son accident vasculaire cérébral. La cinéaste montre également chaque moment où Maud signe des chèques à Vilko (Kool Shen).

Du dénuement à la fois physique et affectif à la signature de chèques, le lien est ainsi tracé, direct. Aucune relation amoureuse ne s’est installée entre Maud, la réalisatrice, et Vilko, le bad boy. Mais Vilko est simplement présent – contrairement à la famille de celle-ci. Une explication nécessaire mais pas suffisante. Abus de faiblesse émeut aussi parce qu’on y sent l’âpre volonté de Catherine Breillat de comprendre ce qu’il lui est arrivé, de « se » comprendre. Quelque chose d’opaque en elle pourtant résiste. Ce qui rend cet Abus de faiblesse jusqu’au bout captivant.

Cinéma
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