Pour avoir quitté son mari violent, elle risque une expulsion

Samia, victime de violences conjugales, risque d’être expulsée pour rupture de vie commune.

Isabelle Chaumard  • 5 février 2014 abonné·es

Illustration - Pour avoir quitté son mari violent, elle risque une expulsion - (FAYEZ NURELDINE / AFP)


Samia est algérienne. Pour s’être séparée de son mari français , après des violences conjugales répétées, elle est aujourd’hui en passe d’être expulsée, sous le coup d’une obligation de quitter le sol français (OQSF). Son audience aura lieu au tribunal administratif de Nîmes, jeudi à 14 h.

Samia s’est mariée il y a trois ans avec un Français. Victime de violences conjugales, elle multiplie depuis un an les plaintes, toutes classées sans suite par le Procureur de la République malgré les témoignages et les certificats médicaux qui les accompagnent. Son mari la met à la porte, engage une procédure de divorce. Commence alors le parcours du combattant de cette jeune femme. Elle trouve un emploi en CDI, prend un appartement, tente de se reconstruire. Mais la préfecture du Gard ne l’entend pas ainsi.

« La loi française prévoit que le titre de séjour ne peut être renouvelé pour les conjoints étrangers de français s’il n’y a pas continuité de vie commune » , explique Daniel Angot, de l’association Réseau éducation sans frontières du Gard. Si Samia est reconnue comme victime de violence conjugale, l’argument de la rupture de vie commune ne tient plus. Elle pourra donc rester sur le sol français.

« Le problème, c’est que la préfecture ne veut pas reconnaître ces violences. Elle n’a pas même attendu le mémoire de la déléguée départementale Droits des femmes, [qui devrait valider la thèse des violences dont Samia serait victime]. C’est pourtant la procédure dans le Gard » , affirme Daniel Angot.

Samia attend beaucoup de l’audience prévue demain à 14 h : « Je veux que l’administration me reconnaisse comme victime de violence. » Si le tribunal administratif de Nîmes n’annule pas l’OQSF, la jeune femme devra quitter la France ou retourner vivre avec son mari… Il lui restera également l’option, si c’en est une, de rester en situation irrégulière et perdre ainsi son emploi, donc son logement.

François Hollande annonçait en novembre dernier un « plan global » et « des dispositions renforcées » pour lutter contre les violences faites aux femmes. Après la théorie, les travaux pratiques c’est pour demain à 14 h.

Actualisation du 6 février 2014 :

L’audience de Samia a eu lieu jeudi après-midi. Le délibéré sera rendu dans une dizaine de jours.

Le tribunal administratif devra se prononcer sur la question suivante : applique-t-on la circulaire Valls de novembre 2012 qui autorise les préfectures à accorder aux ressortissantes algériennes la protection prévue pour les femmes étrangères victimes de violences conjugales ? Ou se borne t-on à suivre les accords franco-algériens obsolètes signés en 1968 qui ne prévoyaient pas ce cas de figure ?

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