Sotchi : des dégâts indicibles

Un écologiste de Sotchi dénonçant les atteintes à l’environnement risque l’incarcération.

Claude-Marie Vadrot  • 6 février 2014 abonné·es

Avant la fin des Jeux, Evguéni Vitisko aura peut-être été emprisonné dans un camp pour trois ans. Le responsable de l’association Ekovahta (Gardiens de l’écologie), créée en 1995, a été condamné pour hooliganisme. Son forfait ? Avoir accroché avec quelques amis une banderole de protestation aux grilles de la propriété du gouverneur de la Région, qui a fait illégalement abattre chez lui de vieux arbres protégés. Le sursis accompagnant la sentence vient d’être révoqué sans justification par un tribunal. Il est surtout reproché à cet ingénieur géologue de tenir rigoureusement le compte des atteintes à l’environnement entraînées par la construction des installations olympiques. Et elles sont nombreuses.

La nouvelle route longée par la ligne de chemin de fer montant de Sotchi au pied des pistes de Krasnaïa Poliana mesure 45 kilomètres, dont 36 ont été installés dans le lit de la rivière Mzimta. Pour ce faire, le cours en a été dévié et canalisé. La rivière est désormais biologiquement morte, en raison de ces bouleversements et des multiples pollutions liées aux travaux. Au point que des sources et des puits fournissent désormais une eau impropre à la consommation, ayant déjà fait des victimes. Les oiseaux qui fréquentaient le site ont disparu. Comme le reste de la faune sauvage, qui attirait les promeneurs.

Les cartes de la région publiées il y a quinze ans montrent que toute la zone concernée par les Jeux, y compris Krasnaïa Poliana, était protégée par un parc national et des réserves naturelles. Cela n’a pas arrêté les aménageurs puisque, chaque fois que c’était nécessaire, les parlementaires russes ont voté une « rectification » des limites des espaces préservés. La plupart des déchets chimiques et métalliques résultant des travaux ont été enfouis sur place sans aucune précaution. Dans la montagne comme dans la zone humide réputée sur laquelle ont été construits les bâtiments qui doivent accueillir les sports en salle. Les écosystèmes de la région ont donc été détruits ou bouleversés de façon irrémédiable, et Evguéni Vitisko est coupable de le clamer haut et fort.

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