Denis Baupin : « On va bien vers la fermeture » de Fessenheim

Selon Denis Baupin, Hollande perdrait gros à renoncer à fermer Fessenheim avant fin 2016.

Patrick Piro  • 27 mars 2014 abonné·es

La commission préparant la prochaine loi de transition énergétique, dont est membre Denis Baupin, spécialiste des questions d’énergie à Europe écologie-Les Verts, examinait jeudi dernier la possibilité juridique pour le gouvernement de demander l’arrêt définitif d’une centrale nucléaire.

Certains écologistes jugent que si le gouvernement avait une volonté forte de fermer Fessenheim, il pourrait l’imposer sans passer par une modification de la loi…

Denis Baupin : Un passage en force est toujours possible. Cependant, au-delà des conséquences politiques, et contrairement à ce que l’on pense généralement, la privatisation partielle d’EDF ne facilite pas les choses, elle a plutôt eu tendance à protéger le nucléaire : dans l’état actuel du droit, une décision de fermeture de la centrale décidée par le gouvernement, qui n’a pas d’appui légal pour le justifier, l’expose à être désavouée devant un tribunal, au titre du préjudice économique que subiraient les 16 % de détenteurs privés de l’entreprise. La démarche actuelle, qui consiste à créer la possibilité juridique pour l’État de demander la fermeture d’une centrale, est la voie plus sûre. Pour Fessenheim, et pour toute autre installation de production nucléaire.

La procédure peut traîner… Percevez-vous une volonté réelle du Président d’aller au bout alors qu’il aurait pu agir dès son arrivée au pouvoir ?

Sincèrement, l’hypothèse d’un François Hollande préparant l’abandon de la fermeture de Fessenheim me semble relever d’une vision complotiste de la situation. Je ne vois pas l’avantage politique qu’il tirerait, fin 2016 et à quelques mois de la présidentielle, à renoncer à l’une de ses promesses les plus emblématiques à l’endroit des écologistes, des alliés dont il aura bien besoin s’il tente d’être réélu. Tous les signaux politiques et juridiques indiquent que l’on va bien vers la fermeture – définitive – de Fessenheim avant fin 2016. Considérons également que si les élus locaux soutiennent à fond la centrale, ce n’est pas le cas d’un bon nombre de municipalités proches, y compris Strasbourg, dont les conseils municipaux ont voté des motions appuyant sa fermeture.

**Une loi de transition énergétique qui irait dans ce sens ne risque-t-elle pas l’hostilité de certains poids lourds socialistes ? **

On connaît les positions acharnées, au gouvernement, d’un Montebourg, issu d’une circonscription de Saône-et-Loire qui est un des pôles nucléaires français, ou d’un Cazeneuve, député-maire de Cherbourg, située à quelques kilomètres de Flamanville et de son nouveau réacteur EPR. Cependant, les vrais pronucléaires ne sont pas si nombreux au PS. Rappelons qu’en 2011 Hollande est arrivé en tête de la primaire avec la proposition de baisser de 75 % à 50 % la part du nucléaire d’ici à 2025, devant Aubry, qui voulait en sortir ! L’objectif du Président reste aujourd’hui la position d’équilibre du PS, j’en suis convaincu.

Fermer Fessenheim, et quoi après ?

En effet, la suite est une question primordiale, il faut que la loi de transition énergétique contienne une disposition forte explicitant l’objectif présidentiel, au-delà de la fin de son mandat actuel, en 2017. Une piste consisterait à y inscrire en toute lettres que l’on va réduire le parc nucléaire d’un tiers avant 2025. Ou encore que toute prolongation de la durée de vie des centrales au-delà de 40 ans nécessitera un aval politique. Mais en dehors du cas du nucléaire, il faut également dire clairement où l’on veut aller, notamment dans le domaine des énergies renouvelables.

Écologie
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