Grenoble, capitale des gauches

La liste d’Éric Piolle, en tête dimanche, se voit concurrencée par celle du PS qui refuse la fusion.

Patrick Piro  • 27 mars 2014 abonné·es

C’est la sidération chez les socialistes grenoblois et leurs alliés. Le dernier sondage donnait la liste de Jérôme Safar à huit points devant celle d’Éric Piolle. Dimanche soir, le dauphin de Michel Destot, maire sortant, s’est retrouvé quatre points derrière (25,3 %, contre 29,4 %). L’écologiste Éric Piolle, à la tête d’une alliance entre Europe Écologie-Les Verts (EELV), le Parti de gauche (PG) et plusieurs mouvements citoyens, s’est retrouvé en position favorable pour diriger une ville de 165 000 habitants – une première. Si le fort taux d’abstention (48 %) a certainement desservi la liste Safar, sur fond de sanction nationale infligée au gouvernement, il ne saurait expliquer l’ampleur du coup de tonnerre grenoblois, qui récompense la qualité de la démarche de la liste Piolle [^2]. « C’est assez rare que je tienne ce genre de discours, mais je suis convaincue que je vais revenir avec vous faire la fête à la mairie de Grenoble », lançait Martine Billard, le 28 février dernier, lors du premier grand meeting de la liste Piolle. Pour la coprésidente du Parti de gauche, c’est la démonstration qu’une forme d’exemplarité politique paye. À l’unisson, Pascal Durand, ancien secrétaire national d’EELV, rappelle avoir lui aussi pronostiqué que la capitale alpine « pourrait devenir la première ville dirigée par une gauche écologiste » .

L’écho national devrait s’amplifier. Chez les écologistes, qui constatent depuis longtemps que l’échelon local leur est le plus souvent favorable, la vitrine grenobloise est particulièrement valorisante : leurs militants y labourent le terrain depuis près de quatre décennies, et c’est dans le creuset de mobilisations locales et citoyennes que la liste s’est composée. Pour le Front de gauche, cette municipale aura mis en scène une divergence plus que tactique entre ses deux principales composantes. À l’automne dernier, les communistes (PCF) abandonnaient le projet de liste commune pour rallier Safar. Mi-février, Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, fustigeait la « grave erreur » du PG à Grenoble. « Les chances d’Éric Piolle d’arriver en tête sont nulles », tranchait, prosaïque, Jérôme Marcuccini, patron des communistes isérois, pour qualifier le défaut de « discipline républicaine » de ses partenaires. À l’heure des négociations, Jérôme Safar agitait le spectre d’une liste à la politique irresponsable, jugeant que « la seule question qui se pose, c’est de savoir si on prend un risque pour le modèle de développement économique de cette ville »  [^3]. Mardi, en début d’après-midi, autre coup de semonce : de tels arguments, et d’autres peut-être moins nobles, ont justifié, pour celui qui prétend encore à la succession de Destot, de n’avoir pas accepté la fusion avec la liste Piolle, laquelle proposait pourtant une composition strictement proportionnelle au résultat du premier tour.

[^2]: Voir Politis n° 1294, du 13 mars.

[^3]: www.lemonde.fr, 24 mars.

Politique
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