Margaret Giesbert

Pour FOG, la démocratie votive doit être contenue dans les limites des intérêts de la possédance.

Sébastien Fontenelle  • 10 avril 2014 abonné·es

Comme beaucoup d’autres commentateurs de droite, l’ex-directeur de l’hebdomadaire assisté le Point – Franz-Olivier Giesbert (FOG) – a jugé, dans un récent éditorial, que la substitution de M. Valls à M. Ayrault dans Matignon était une excellente nouvelle. FOG, qui tient manifestement que la démocratie votive doit être contenue dans les limites que dicte la préservation des intérêts de la possédance, trouve, par exemple, tout à fait admirable que « M. Hollande » ait décidé de ne pas « entendre le message des abstentionnistes de gauche aux élections municipales » et de rester « sourd au malaise de cette gauche » – dont lui-même [^2], solidement calé sur l’épais matelas des aides que lui consent l’État [^3], ne manque jamais de fustiger les manies « étatistes »  – pour négocier plutôt un (nouveau) tournant droitier où la personnalité de M. Valls sera, de fait, un plus.

Au reste : « M. Hollande n’avait pas le choix. » Car s’il avait (à rebours des traditions où son parti se renie depuis trente ans) tenu compte de ce « message », il aurait dû s’engager « dans une politique à courte vue, sur fond de fausse relance, qui menait tout droit à un désastre économique et social ». Tandis qu’en optant pour une « accélération de la politique de l’offre qui seule peut relancer la machine et créer des emplois », il peut encore sauver une France « où la haine sociale est telle que des syndicats appellent à manifester contre les baisses de charge des entreprises », assure FOG – qui énonce donc très posément (et dans le très petit périmètre de ces quelques sentences) un nombre assez impressionnant de contre-vérités.

Car, dans la vraie vie, on chercherait en vain la trace d’appels syndicaux à « manifester contre les baisses des charges des entreprises »  : l’opposition de certaines centrales au « pacte de responsabilité » vient – et ce n’est pas du tout la même chose – de ce qu’elles jugent très insuffisantes les « contreparties » demandées au patronat en échange des grâces qui lui seront, de fait, consenties. Elles ne remettent donc pas en cause le principe d’une baisse des charges des entreprises : juste qu’elle soit mieux négociée. Plus généralement – et contrairement, là encore, à ce que psalmodie FOG –, ce n’est pas l’entreprise qui crée l’emploi [^4]. Sans quoi, le résultat des trois décennies de « politique de l’offre », où les « socialistes » et l’autre droite n’ont cessé, depuis 1984, de lui consentir toujours plus de facilités, eût sans doute été quelque peu différent de ce qu’il est aujourd’hui.

Mais il est vrai aussi que, s’il devait remettre en cause le modèle qui se solde, trois décennies après son adoption, par un accroissement constant du chômage et des inégalités – et tenir compte, plutôt que de ses préjugés, de la réalité –, FOG devrait renoncer aussi au confort d’une sinécure où l’État sponsorise la publication de ses bobards : on comprend, dès lors, qu’il préfère continuer de psalmodier des slogans thatchériens.

[^2]: Franz-Olivier Giesbert, donc : ça serait bien que tu suives, merci.

[^3]: Rappelons ici que le Point est tous les ans gavé de plusieurs millions d’euros de subventions publiques.

[^4]: Lire : http://blog.mondediplo.net/2014-02-26-Les-entreprises-ne-creent-pas-l-emploi#Non-pas-les-entreprises-la

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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