L’appel au large des Verts

Les écologistes proposent à dix partis, du MoDem au FDG, de collaborer sur des sujets ponctuels.

Patrick Piro  • 12 juin 2014 abonné·es
L’appel au large des Verts
© Photo : CITIZENSIDE/NICOLAS KOVARIK

Les écologistes, à leur tour, ont pris acte des bouleversements politiques induits par les scrutins municipal et européen. La lettre envoyée le 3 juin par Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’Europe Écologie-Les Verts (EELV), à dix mouvements qui ont soutenu François Hollande au second tour de la présidentielle de 2012 [^2] fait état d’une « crise exceptionnelle » qui menace la cohésion sociale et l’Union européenne. Responsables : l’incapacité de François Hollande à tenir ses promesses, les scandales politiques, mais aussi le manque d’impact dans l’opinion des alternatives « au capitalisme dérégulé et au productivisme destructeur ». Pour déclencher le sursaut, les écologistes proposent à leurs interlocuteurs de peser sur trois terrains susceptibles de dépasser les clivages d’appareils : la relance de l’emploi, la transition énergétique et la réforme de la démocratie. Les écologistes s’étaient collectivement félicités d’avoir plutôt bien résisté dans les urnes. Le chef de file des sénateurs EELV, Jean-Vincent Placé, juge pour sa part que le résultat aux européennes « n’est pas bon ». Une manière de constater que la sortie du gouvernement organisée par l’ex-ministre Cécile Duflot n’a que partiellement épargné aux écologistes la sanction qui a frappé les socialistes. La lettre signée par Emmanuelle Cosse semble ébaucher une nouvelle stratégie. L’alliance avec les socialistes n’est désormais plus privilégiée. Dès le soir du scrutin européen, le 25 mai, Jean-Vincent Placé avait tendu la main aux forces « démocratiques et humanistes, jusqu’au MoDem  […]. Il ne s’agit pas de rechercher des partenariats politiques, mais de décrocher des avancées consensuelles, comme l’injection d’une dose de proportionnelle aux élections, voire l’instauration d’une VIe République » .

Cependant, l’appel au centre-droit (Cap 21 et MoDem) ne fait pas l’unanimité, « même si personne ne veut d’un ersatz d’une gauche plurielle à la remorque du PS, constate Élise Lowy, à la gauche d’EELV. Pour notre part, nous sommes prêts à assumer une rupture plus marquée avec le PS, pour un rapprochement avec les mouvements citoyens et les partis à la gauche du PS, y compris les “socialistes affligés”. La lettre du secrétariat national est une position d’attente, traduisant les divergences au sein d’un bureau exécutif où la majorité d’Emmanuelle Cosse est aujourd’hui clivée. Il y aura donc un débat très ouvert lors du prochain conseil fédéral [^3] ». La question centrale reste bien celle d’une refondation à gauche, convient Jean-Vincent Placé. « Pour ma part, je réprouve par avance l’idée d’un tête-à-tête privilégié avec le Parti de gauche, même si les alliances locales, comme à Grenoble, ne me posent pas de problème. Quant aux appels globaux à l’unité, ils se sont toujours soldés par le retour de chacun dans son coin. Il faut procéder par cercles concentriques, en ralliant d’abord la gauche du PS. Et je souhaite ainsi que l’on réfléchisse à l’idée d’une primaire à gauche pour la prochaine présidentielle. » Opposé en cela à l’approche de Cécile Duflot, le sénateur considère qu’EELV n’est pas le moteur de la dynamique. « C’est la gauche du PS, selon sa capacité à pousser sa logique critique, qui détient la clé de la future recomposition. Les écologistes sont actuellement figés par un équilibre interne entre forces sensiblement équivalentes – partisans d’un rapprochement avec le Front de gauche, d’une autonomie radicale, ou d’un retour au gouvernement. »

[^2]: Voir p. 7.

[^3]: Les 14 et 15 juin.

Politique
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