Indémodable John Le Carré

L’espion qui venait du froid, récit minutieux et glaçant, est un classique qu’il n’est pas inutile de relire.

Claude-Marie Vadrot  • 13 août 2014
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Indémodable John Le Carré
© Photo : L'écrivain britannique John Le Carre, le 02 octobre 2001 à Paris.(MARTIN BUREAU / AFP)

Cinquante ans après sa parution en France , il n’est pas inutile de relire, pour le plaisir et pour retrouver une époque, le troisième roman d’espionnage de cet auteur qui fit des travaux pratiques dans les services secrets britanniques pendant une douzaine d’années avant de devenir romancier.

Le troisième, car L’espion qui venait du froid , au succès mondial, avec plus de 20 millions d’exemplaires vendus, a fait oublier les deux premiers. Il s’agit du récit minutieux et glaçant d’une manipulation coproduite, ce qui est inhabituel pendant la Guerre Froide qui sert de décor au récit, par les services secrets britanniques et soviétiques pour déstabiliser ceux de la République Démocratique Allemande qui entoure alors la ville de Berlin.

Illustration - Indémodable John Le Carré

Du suspens, du cynisme au nom de la raison d’Etat autour d’une ville mystère, Berlin Est, versus Berlin Ouest, disparue en 1989. Le roman n’offre ni poursuites épiques, ni fusillades spectaculaires, ni gadgets à la James Bond : juste des hommes aux prises avec d’autres hommes et avec la machine des services spéciaux. Il raconte avec une précision cynique les pérégrinations et réflexions «d’une redoutable bande de salauds» , comme l’assure l’un des personnages, après avoir rappelé une phrase attribuée à Staline : «La liquidation de 500 000 personnes relève de la statistique alors qu’un individu tué dans un accident de voiture est une catastrophe nationale» . Plusieurs dirigeants actuels pourraient, dans le secret de leurs bureaux, la reprendre à leur compte…

A lire tout en se souvenant que John Le Carré, alias John Moore Cornwell, diplômé en langue allemande, n’a jamais voulu raconter quelles avaient été ses activités pendant son passage dans les services spéciaux anglais ; et il assure dans une nouvelle préface que le roman «n’est pas authentique mais crédible car il posait la même bonne question que nous nous posons cinquante ans plus tard : jusqu’où sommes nous capable d’aller au nom de la légitime défenses des valeurs de l’Ouest sans les abandonner en chemin ?»

  • L’espion qui venait du froid , John Le Carré, Folio-policiers, 352 p., nouvelle édition 2013.
Littérature
Temps de lecture : 2 minutes
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