Crèches : Promesse non tenue

Le gouvernement s’appuie sur de mauvaises raisons pour rogner le budget des créations de places en crèche.

Olivier Doubre  • 18 septembre 2014 abonné·es
Crèches : Promesse non tenue
© Photo : AMELIE-BENOIST / BSIP / AFP

Après l’élection de François Hollande, le gouvernement Ayrault avait promis la création de 100 000 nouvelles places en crèche d’ici à 2017. Cet objectif vient d’être remis en cause. Si le gouvernement avait bien prévu en 2013 une augmentation annuelle de 7,5 % jusqu’en 2017 des fonds alloués à la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf) pour la petite enfance, seule la création de 6 000 places a été décidée au cours de l’année dernière au lieu des 11 000 prévues.

Les places en crèche dépendent en partie de la volonté des communes, or les élections municipales de mars dernier ont quelque peu ralenti cette politique ambitieuse. En effet, dans un grand nombre de communes, en raison de la proximité des élections, les équipes municipales ont renoncé à s’engager dans de nouvelles dépenses pour créer des places. Par ailleurs, un retard est intervenu dans la signature entre l’État et les partenaires sociaux de la convention d’objectifs et de gestion 2013-2017 de la branche famille de la Sécurité sociale (advenue seulement au mois de juillet 2013). Ces divers facteurs ont entraîné une sous-consommation des crédits alloués à la Cnaf – 243 millions d’euros pour l’année 2013. Le gouvernement, dans sa volonté d’économies tous azimuts, a pris prétexte de cette non-consommation de l’ensemble de l’enveloppe pour recalculer chaque nouvelle augmentation annuelle. Si, après les municipales, il semble que les créations de places en crèche soient reparties à la hausse, les crédits de la Cnaf jusqu’en 2017 seront amputés d’au moins 1,4 milliard d’euros. Jean-Louis Deroussen, président de l’institution, a eu beau dire que « l’objectif des 100 000 places demeure maintenu, mais avec un retard », un bon nombre d’associations familiales ne décolèrent pas. L’Union des familles laïques rappelle que la France connaît un « déficit criant d’environ 400 000 places en crèche » et qu’avec ces économies « même l’objectif d’en créer seulement 100 000 risque de ne pas être réalisable ». Or, cette nouvelle coupe budgétaire intervient au moment où l’Institut national d’études démographiques (Ined) publie une étude sur les chances d’un jeune enfant de bénéficier d’un accueil en crèche [^2]. Il en ressort que seuls 16 % des enfants non encore scolarisés y étaient accueillis en 2011, quand 32 % des parents disent « préférer » ce mode de garde. Et, parmi ceux qui ne l’ont pas obtenu, plus de 40 % continuent de le « regretter », pour des raisons économiques et d’emploi du temps, mais d’abord parce qu’ils le considèrent comme une garantie d’un meilleur éveil et d’un meilleur apprentissage de la vie en collectivité pour leurs enfants.

De fortes inégalités demeurent entre zones rurales et urbaines, et seules l’Île-de-France, la région Paca et la Corse voient plus de 35 % des enfants accueillis en crèche. Et si les familles nombreuses et les mères de moins de 25 ans ont plus de chances d’obtenir une place, les mères isolées n’ont pas d’accès privilégié à ce mode de garde, alors qu’elles cumulent faibles revenus, précarité et difficultés d’organisation.

[^2]: Cf. Population & sociétés, Ined, n° 514, sept. 2014. www.ined.fr

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