Plus jamais tu ne t’y laisseras prendre

Il y a lurette que le PS considère que la richesse doit aller par priorité aux nanti(e)s.

Sébastien Fontenelle  • 9 octobre 2014 abonné·es

Cette semaine, un mec de droite a publiquement dit le fond de sa pensée, qui est que rien n’est si furieusement stimulant pour la libido qu’un lever de soleil sur le Capital. Il a, dans le cadre de cette exhibition, notamment (mais posément) déclaré : « Le socialisme ? Ce n’est pas la richesse pour chacun. » (Je recommande, pour le traitement des déprimes légères, la lecture à haute voix et plusieurs fois d’affilée de cette profération, dont le niveau de c… d’extravagance peut selon moi constituer un puissant euphorétique [^2].) Il a également expliqué que le Parti « socialiste » (P« S ») – qui se trouve être le sien, puisque nous parlons ici, may be l’avais-tu deviné, de l’indépassable François Rebsamen – était, dans ces matières, en train de faire enfin sa « mue idéologique » et de se rendre à l’évidence – avec, certes, vingt siècles de retard environ, et c’est assez dommage, parce que pendant ce temps-là n’oublions jamais que la gauche liechtensteinoise a de son côté fait son Bad-Godesberg dès l’an de grâce 1123, mais bon, mieux vaut tard (et votard) que jamais – que (feu) Ronald Wilson Reagan n’était pas seulement très (très) sexy, mais qu’au surplus il sentait formidablement bon le sable chaud.

Et, certes, la première de ces deux considérations est, reconnaissons-le (même s’il nous en coûte de concéder qu’il peut arriver à M. Rebsamen de formuler autre chose que des c… extravagances), parfaitement vraie, puisque, de fait, il y a lurette – trois décennies au moins – que le P« S » considère effectivement que « le socialisme n’est pas la richesse pour chacun », mais que cette dernière doit d’abord continuer d’aller par priorité aux nanti(e)s – prenez ces milliards, m’sieur Gattaz –, cependant que toi, Prolo(tte), tu vas gentiment dire merci quand on va t’augmenter la petite retraite de huit gros euros par mois – qu’est-ce que tu vas festoyer, putain de veinard(e).

En revanche : il est faux – et sans doute aussi un peu mensonger – de suggérer, comme a donc fait François Rebsamen, que la conversion des « socialistes » made in France au libéralisme décomplexé serait quelque chose comme une nouveauté de cette année – puisqu’en vérité cela fait dans le meilleur des cas trente ans (j’viens d’te l’dire, ça s’rait bien qu’tu suives) qu’elle a été finalisée, sous le sceau de l’austérité (ou mourir), par M. Mitterrand et ses complices gouvernementaux du mitan des  1980’s. Mais cette contre-vérité a du moins la vertu – je me comprends – qu’elle permet de maintenir l’illusion que le P« S » serait, en 2014, encore un peu à gauche, pour ce qui touche à l’économie, de l’UMP de MM. Copé (rires) & Sarkozy (hilarité soutenue). Alors maintenant, regarde-moi dans les yeux, et jure-moi, s’il te plaît, que tu as quant à toi compris ce qu’est cette « gauche » de droite – et que plus jamais tu ne t’y laisseras prendre.

[^2]: Neffet : ce mot n’existe pas encore. Mais il est tellement bien, sans déconner, qu’il devrait. J’attends donc ton appel, Pierre Larousse.

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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