CFDT : Choyés par le pouvoir

La plupart des dirigeants de la CFDT connaissent des carrières confortables après leur départ de la confédération. Merci qui ?

Thierry Brun  • 6 novembre 2014 abonné·es

Dans les allées du pouvoir, on croise de nombreuses têtes d’anciens dirigeants syndicalistes de la CFDT. L’ex-secrétaire général, François Chérèque, est particulièrement choyé par le gouvernement, lui qui répétait pourtant qu’on ne le verrait jamais assumer une fonction politique. En janvier 2013, il est bombardé inspecteur général des affaires sociales en Conseil des ministres, avec une rémunération de 7 255 euros par mois. L’ex-leader syndical est aussi président de l’Agence du service civique et de Terra Nova, un think tank proche du Parti socialiste. Sous le gouvernement Ayrault, l’ancienne dirigeante de la CFDT, Laurence Laigo, a intégré en janvier 2013 le cabinet de la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, pour devenir conseillère en charge de l’innovation sociale et des politiques européennes. Elle a depuis rejoint Matignon, Jean-Marc Ayrault lui ayant confié fin 2013 une mission d’expertise relative à « l’innovation sociale, au bénéfice du renouvellement des pratiques et de la culture managériales » .

L’emblématique Édouard Martin , connu pour sa défense des sidérurgistes lorrains lors de la fermeture des derniers hauts-fourneaux d’ArcelorMittal, a bénéficié lui aussi d’un coup de pouce du pouvoir. Propulsé tête de liste PS aux européennes dans le Grand Est, il est désormais député européen. Son élection éclaire les liaisons entre le parti et le syndicat réformiste. D’autres encore ont été lancés dans les cercles du pouvoir socialiste. L’ancien numéro deux de Nicole Notat, Jacky Bontems, s’est montré un fervent supporter de François Hollande en animant un think tank, le Réseau 812, pendant la campagne présidentielle de 2012. Il a été chargé de mission au cabinet de Jean-Marc Ayrault avant de rejoindre le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, aujourd’hui France Stratégie. L’homme de confiance du Président est à l’origine de nombreuses notes transmises à l’Élysée sur le dialogue social ou le marché du travail. L’inoxydable Nicole Notat, ancienne secrétaire générale de la CFDT, est quant à elle passée de la droite à la gauche au pouvoir pour se bâtir une belle reconversion politique et économique. L’actuelle présidente du Siècle, club d’influence regroupant des dirigeants politiques, économiques, culturels et médiatiques, est administratrice de grands groupes. Elle est entrée dans le monde ** des affaires en créant Vigeo, une agence de notation « sociale et environnementale » soutenue financièrement par les entreprises du CAC 40.

En 2013, sous la gauche au pouvoir, Nicole Notat a été chargée d’une mission par Fleur Pellerin, alors ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique, et de l’animation d’un groupe de travail intitulé « Promouvoir et valoriser l’entrepreneuriat responsable », pour les Assises de l’entrepreneuriat. Cette proximité avec les affaires et les pouvoirs en place n’est pas une nouveauté. La plupart des ex-dirigeants de la CFDT, à l’exception d’Eugène Descamps, qui fut secrétaire général de la CFDT jusqu’en 1971, ont été à la tête d’entreprises privées ou nommés à des postes à hautes responsabilités dans des organismes publics.

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