Billie Holiday : Une reine en errance

Christine Pouquet et Samantha Lavital donnent vie à Billie Holiday.

Gilles Costaz  • 4 décembre 2014 abonné·es

En fond de scène, un mur de valises. Comme autant d’errances qui ne finiront jamais. Comme autant de niches où l’être humain peut quand même vivre ou survivre – et où le théâtre peut jouer son jeu grave et facétieux. C’est sur cette idée et ce décor que s’appuie la pièce écrite et mise en scène par Christine Pouquet autour de la personnalité de Billie Holiday, Neige noire .

Dans un savant désordre nous est contée la terrible et glorieuse existence de la chanteuse américaine. Billie connaît à peine son père, tandis que sa mère la délaisse et vend sa virginité de gamine de 12 ans à un voisin sans scrupule. La route qui suit est semée d’embûches qui s’appellent racisme, prostitution et drogue. Elle n’en deviendra pas moins « Lady Day » – comme l’appellera Lester Young –, avant de mourir à 44 ans. Il y a eu beaucoup de spectacles sur Billie Holiday. L’an dernier, Viktor Lazlo en donnait un, écrit (c’est beaucoup dire !) par Éric-Emmanuel Schmitt. Celui-ci, conté d’une jolie plume, est différent des précédents, car Christine Pouquet l’a conçu comme un duo. Billie est au centre du spectacle, mais elle a avec elle un partenaire qui est un autre narrateur ainsi qu’un ami, un amant, un fou – comme un roi a son fou dans les pièces de Shakespeare. Ainsi la tragédie a-t-elle toujours son envers comique. On eût d’ailleurs aimé plus de tonalité tragique dans le jeu charmant de Samantha Lavital, qui chante de belle façon Strange Fruit et les autres grands blues mais évoque peu, dans son jeu, les stigmates et les douleurs de l’artiste. Elle n’en a pas moins une vraie présence, que complète bien le jeu débridé de Philippe Gouin (interprétant le rôle multiple du partenaire en alternance avec Rémi Cotta).

Théâtre
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