FSM : Tunis, capitale altermondialiste

Plus de 4 000 organisations témoigneront en Tunisie de la vitalité de l’engagement citoyen.

Patrick Piro  • 19 mars 2015 abonné·es
FSM : Tunis, capitale altermondialiste
© Photo : Mohamed Amine Ben Aziza / ANADOLU AGENCY / AFP

On aurait bien voulu organiser cette édition en Égypte, mentionne Gus Massiah, membre du conseil scientifique d’Attac. Mais cela n’a pas été possible… » La tenue du Forum social mondial (FSM) dans son pays de naissance aurait pris une dimension particulière pour ce pilier du mouvement altermondialiste. Lui qui avait vibré en plein FSM de Dakar, un peu incrédule, au renversement du gouvernement Moubarak par l’énorme mobilisation de la place Tahrir, au Caire, fin janvier 2011. Le repli du FSM à Tunis, où la précédente édition s’était tenue en 2013 – une première pour le monde arabo-musulman –, est une conséquence de la confiscation de la révolution égyptienne par l’armée. Et les grandes difficultés que rencontrent le Maghreb et le Moyen-Orient pour cheminer vers la démocratie depuis le « printemps arabe » n’offraient pas d’alternative dans la région. La Tunisie, où tout a commencé en décembre 2010, y reste à ce jour le seul pays où la société civile soit parvenue à imposer une transition, et ce de manière pacifique.

L’état des progrès de la démocratie tunisienne et des mouvements sociaux du pays depuis 2013 sera l’un des temps forts du rassemblement altermondialiste, lequel se tiendra du 24 au 28 mars sur le campus de l’université El Manar. Au-delà, et en dépit d’une perte de visibilité médiatique dans les pays européens, le processus altermondialiste reste vivace, alimenté par les multiples rébellions citoyennes – Occupy, Indignés, etc. – qui ont surgi un peu partout dans le monde depuis le printemps arabe. De 2013 à 2015, plus de cinquante événements dans le monde, de taille nationale ou internationale, ont été estampillés « forum social » – paix et désarmement à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine), grands projets inutiles imposés à Rosia Montana (Roumanie), migrations internationales à Johannesburg (Afrique du Sud), biodiversité à Manaus (Brésil), etc. « Certes, les défis sont immenses, et nos mobilisations ne parviennent pas à contrecarrer notablement le libéralisme, convient Gus Massiah. Cependant, les mouvements de résistance et de proposition viendront au FSM, c’est a minima une satisfaction qu’un tel événement tienne la route dans le contexte actuel… »

Tunis attend quelque 60 000  participants représentant plus de 4 000 organisations issues de 121 pays, pour 1 200 activités inscrites au programme ^2. Les associations algériennes et marocaines devraient être plus massivement présentes qu’en 2013. Croissance aussi pour la délégation française – 600 personnes inscrites. Plusieurs rassemblements thématiques sont organisés en marge du FSM, tels les classiques forums « des parlementaires », « des médias libres », « science et démocratie », « eau, planète et peuples ». Les mouvements climatiques organisent une importante réunion internationale pour préparer la mobilisation citoyenne pendant le sommet climat de Paris, à la fin 2015 (COP 21). Enfin, plusieurs partis de gauche se sont donné rendez-vous le 29 mars à Tunis, après la clôture du FSM, dans le sillage du succès électoral de la coalition rouge-verte Syriza en Grèce, et de l’espoir d’une perspective identique en Espagne, où Podemos est en tête des sondages pour les élections législatives de cette année.

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