Les villes pour le climat

La ville fait partie de l’écosystème que l’on veut préserver.

Jérôme Gleizes  • 2 avril 2015 abonné·es

À Copenhague, en 2009, les gouvernements ont été incapables de prolonger le protocole de Kyoto pour lutter contre le changement climatique, et ce malgré la présence de nombreux chefs d’État : Obama, Chávez, Sarkozy, Lula… Face à l’incapacité des États à préserver le bien commun du climat, on a observé une montée en puissance des collectivités territoriales pour se substituer aux gouvernements. Ainsi, les villes américaines s’étaient engagées dès 2005 à respecter le protocole de Kyoto, non ratifié par le gouvernement Bush, en signant le Mayors Climate Protection Agreement, représentant aujourd’hui 1 060 villes pour presque 89 millions d’Américains ^2. Greg Nickels, maire de Seattle, dans l’État de Washington, avait pris l’initiative de cet accord : réduction annuelle de 683 000 tonnes de CO2, soit l’équivalent de 148 000 voitures retirées de la circulation par an. En 1993, déjà, Portland était devenue la première grande ville américaine à développer un plan d’action contre le réchauffement, parvenant notamment à augmenter l’utilisation des transports en commun de 75 % en trois ans. L’usage des ampoules basse consommation pour les feux de circulation avait également réduit de 80 % l’utilisation d’énergie : plus de 500 000 dollars d’économie par an.

En 2006, le mouvement des villes en transition a été lancé dans la ville anglaise de Totnes par Rob Hopkins : « Si nous attendons les gouvernements, ça sera trop peu et trop tard ; si nous agissons individuellement, ça sera trop peu ;
si nous agissons en tant que communautés locales, ça sera peut-être assez, peut-être juste à temps [^3].   » Il est donc nécessaire de construire la résilience des territoires, « la capacité d’une ville à ne pas s’effondrer aux premiers signes d’une pénurie de pétrole ou de nourriture ». La permaculture y a beaucoup d’importance, ainsi que la relocalisation. La ville est vue comme faisant partie de l’écosystème que l’on préserve. Le contrôle de l’énergie et celui de l’alimentation y prennent donc une place centrale.

Autre initiative : 350.org, qui s’attaque au volet financier et monétaire en lançant des campagnes de désinvestissement dans les énergies fossiles. Déjà 181 institutions et collectivités territoriales, à l’image de San Francisco, de Seattle ou encore de l’université de Stanford, et 656 particuliers (détenant plus de 50 milliards de dollars) se sont engagés à retirer leurs fonds des énergies fossiles. D’après une étude de l’université d’Oxford ^4, le mouvement de désinvestissement des énergies fossiles croît plus rapidement que les précédentes campagnes de ce genre. Cela représente une menace considérable pour cette industrie. Selon le rapport « Unburnable Carbon », la Carbon Tracker Initiative indique que les 200 premières entreprises du secteur fossile possèdent des réserves représentant 555 gigatonnes d’émissions potentielles de CO2 ^5, soit cinq fois le niveau d’émissions que nous devons atteindre si nous souhaitons maintenir le réchauffement sous la barre des 2 °C. Enfin, les collectivités territoriales sont des acteurs économiques qui peuvent solvabiliser des secteurs comme l’agriculture bio ou la rénovation thermique. Des acteurs bien plus efficaces que la main invisible du marché [^6]. 

[^3]: www.transitionnetwork.org et www.transitionfrance.fr

[^6]: Voir l’initiative des grandes villes derrière Paris sur Paris.fr

Chaque semaine, nous donnons la parole à des économistes hétérodoxes dont nous partageons les constats… et les combats. Parce que, croyez-le ou non, d’autres politiques économiques sont possibles.

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