Nomination de Delphine Ernotte à France Télé : Olivier Schrameck nie en bloc

Jean-Claude Renard  • 26 mai 2015 abonné·es
Nomination de Delphine Ernotte à France Télé : Olivier Schrameck nie en bloc
© Photo : Stéphane de Suketin, Pascal Pavani/AFP

Sous le feu des critiques, le président du CSA ne pouvait y échapper. C’est que la nomination du prochain président de France Télévisions, ou plutôt de la prochaine présidente, en l’occurrence Delphine Ernotte, directrice exécutive d’Orange France, menée en toute discrétion, à l’écart du débat public et même en toute opacité, en a agacé plus d’un. Et légitimement. D’autant qu’en quelques jours, Mediapart d’une part, Le Monde d’autre part, ont remis en cause le processus de cette nomination, en avançant de petits arrangements entre amis, des accords troublants, un jeu d’ascenseurs, de réseaux, d’amicalités, quand au départ concourent 33 candidats, dont certains très solides, vite recalés, sans explication, sans motif, comme Marie-Christine Saragosse (patronne de France Médias Monde). Ici une candidate élue (Delphine Ernotte), pilotée par un communiquant qui change de camp (Denis Pingaud), et reprenant le programme d’un concurrent (Didier Quillot), là un jeu d’alliances, la pression d’une tutelle, un lobbying intensif…

Convoqué par la Commission des Affaires culturelles et de l’Education à l’Assemblée nationale, Olivier Schrameck devait répondre à cette dernière nomination à toutes ces questions, sous forme d’accusation, en cette fin de journée, ce mardi 26 mai, devant un parterre de parlementaires. Avant toute question, le président du CSA a d’abord dénoncé les « raccourcis » hardis, voulu expliquer ce tollé sur l’opacité comme « un intérêt collectif sur le service public » , avant de revendiquer une délibération « collégiale » , nié tout favoritisme [à l’égard de Delphine Ernotte], même si l’on peut « discuter ce choix et cette procédure » , une procédure qualifiée de « régulière, indépendante de toute pression, économique, politique, ou personnelle » , avec « une conviction forgée au fil des étapes » . Parce que « la loi est non seulement notre référence mais notre impératif » . En détail, le président du CSA dit avoir « découvert le projet [de Delphine Ernotte], comme les autres, le 6 mars, pas avant » , avant d’ajouter, à propos des sages du Conseil qu’il est « totalement faux que je les aurais menacés de poursuites judiciaires » , en cas de révélations à la presse. « La collégialité est au fondement même de la conscience du service public , a poursuivi Olivier Schrameck, gage de pluralisme interne. »


Illustration - Nomination de Delphine Ernotte à France Télé : Olivier Schrameck nie en bloc


D’une allégation à une accusation, d’une révélation à l’autre, à vrai dire, si une transparence totale avait régné dans cette nomination, tout cela ne serait pas arrivé. Pour sûr, sous Nicolas Sarkozy, la nomination d’un président du service public, par le fait du prince, posait moins de problème de transparence ! On savait où s’en tenir, et qui regarder ! En tout cas, les propos en préambule d’Olivier Schrameck ont dit combien il s’attendait aux reproches, aux attaques. D’une certaine manière, il avait répondu en amont. Et c’est exactement ce qui est arrivé devant ce banc de parlementaires (Michèle Tabarot, Barbara Pompili, Franck Riester, Marcel Rogemont, Michel Françaix, entre autres), dont les remarques et doléances, lues de façons très scolaires, le nez sur la feuille (à l’exception de Marie-George Buffet) se sont principalement appuyées sur les derniers articles de presse, soulevant parfois, mais tout de même, les risques de conflits d’intérêt, le mode d’arbitrage, les zones d’ombre. Il a suffi à Olivier Schrameck de renvoyer les législateurs à leur loi sur « la confidentialité des débats » et le « respect des sources » , de se déclarer ni « le supérieur des membres du CSA » (quoique), ni « responsable de leur agenda, ni de leurs contacts » , de souligner que les soupçons d’un copier/coller d’un programme sur l’autre, celui d’un candidat, s’effacent devant les mêmes missions imposées par le service public (ce qui, pour le coup, est parfaitement vrai ; chacun des concurrents s’alignant sur le même programme : restriction des coûts, rajeunissement de l’audience, développement du numérique et des nouvelles technologies).

In fine, a ponctué Olivier Schrameck , le CSA « n’a manqué à aucun de ses devoirs fondamentaux » (l’impartialité, l’indépendance). « Nous avons fait des choix, nous les assumons. » Olivier Schrameck balaye ainsi devant la Commission des Affaires culturelles toutes accusations. Trop bien averti par les attaques.

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