Le Lyon-Turin fait la manche

Le projet de liaison ferroviaire à grande vitesse fait la course aux financements.

Thierry Brun  • 7 octobre 2015 abonné·es
Le Lyon-Turin fait la manche
© Photo : Bergamaschi/NurPhoto/AFP

Invités à s’expliquer devant la Commission des finances et du développement durable, le 16 septembre, Michel Destot, député socialiste, et Michel Bouvard, sénateur Les Républicains, coauteurs d’un rapport remis en juillet au Premier ministre sur les nouvelles sources de financement des travaux du tunnel de 57 kilomètres entre la France et l’Italie, n’ont pas convaincu. « L’histoire nous montre que les coûts sont en permanence dépassés. J’aimerais qu’on me cite un projet qui les a respectés ! Quel dépassement avez-vous envisagé dans votre prospective ? », a interpellé le député EELV Éric Alauzet. La question est restée sans réponse. Pourtant, le coût du tunnel franco-italien explose. De 8,5 milliards d’euros, il devrait passer à 12 milliards, estime Rete ferroviaria italiana, la filiale de gestion des infrastructures de la SNCF italienne.

Signe que le grand projet se transforme en gouffre financier, le chantier italien de la Maddalena est quasi à l’arrêt depuis juillet. Côté français, l’Agence de financement des infrastructures de transport (Afitf) indique que le promoteur public en charge de la liaison ferroviaire, Tunnel euralpin Lyon-Turin (TELT), a validé 1,24 milliard de dépenses en 2014 pour le seul programme d’études et de reconnaissances. Un budget imprévu à la charge des États, alourdi par une baisse importante des subventions européennes. Dans une lettre adressée au Premier ministre en juillet, la députée EELV Michèle Rivasi a dénoncé le manque de transparence du financement de ce projet. Elle a rappelé qu’ « un directeur général et un directeur des travaux ont été condamnés pour trucage d’appel d’offres » et qu’il est « prouvé que la mafia a bénéficié de marchés, selon les carabiniers et les écoutes téléphoniques qui ont été publiées »  [^2]. Pour parer au manque de moyens, le rapport Destot-Bouvard propose une écotaxe dite « Eurovignette alpine » pour trouver 40 millions supplémentaires par an. « Ainsi, les rapporteurs recommandent de laisser les camions polluer les routes pendant soixante ans pour financer ce projet ! », ont réagi les opposants. Alors que les capacités nécessaires au transport de fret et de passagers existent déjà.

[^2]: Voir les articles de Thierry Brun sur son blog, sur Politis.fr