« Phantom Boy » : Un gamin fantastique

Léo, alias Phantom Boy, premier superhéros enfant  et français conquiert Hollywood.

Ingrid Merckx  • 14 octobre 2015 abonné·es
« Phantom Boy » : Un gamin fantastique
© **Phantom Boy** d’Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli, 1 h 24. Photo : Folimage

Le gardien de l’immeuble se penche : « Mignon toutou… » Mais, quand le minuscule clébard se transforme en roquet belliqueux, il se prend une godasse. Rufus le chien jouait déjà les seconds rôles dans Une vie de chat, joli polar parisien réalisé par Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli en 2010. Il revient dans Phantom Boy, des mêmes auteurs, avec une mission qu’il partage avec ses maîtres gangsters : distiller un humour fécond dans une œuvre qui ne se départit pas d’une certaine gravité. Dans Une vie de chat, la petite Zoé avait perdu son père et la parole. Dans Phantom Boy, Léo, 11 ans, est atteint d’une maladie qui lui fait perdre ses cheveux… La veille de son hospitalisation, il révèle à sa petite sœur Titi son super-pouvoir : en tombant malade, il a acquis la capacité de sortir de son corps et de se promener dans les airs.

La métaphore est si évidente que ce pouvoir a d’abord l’air d’une astuce pour transcender l’éprouvante réalité. Mais quel superhéros de Marvel n’est pas né d’un profond tourment ? Seul survivant d’une planète disparue, Superman est arrivé en Amérique en même temps que les juifs d’Europe. Orphelin et souffre-douleur, Peter Parker est mordu par une araignée radioactive et dévoré par la colère. Les parents de Batman ont été abattus devant ses yeux d’enfant dans une cité décadente… Au pays des comics, Phantom Boy est un magnifique nouveau venu. Premier superhéros enfant (et made in France… ), il conquiert un New York et un Hollywood mythiques. Ses survols de la grosse pomme sont totalement planants et sa présence-absence manifeste une fantastique invention scénaristique et graphique, ainsi qu’un altruisme et un courage surhumains.

L’action policière se tient entre l’hôpital, où Léo assiste un flic invalide (Édouard Baer) et sa copine journaliste (Audrey Tautou) dans leur enquête, et la zone portuaire, où sévit une gueule de Picasso (Jean-Pierre Marielle), mélange du personnage de V pour Vendetta, du Masque de fer et du Jocker. Les scènes où Léo flotte autour de ses parents et de sa sœur sont bouleversantes. Les cinéastes ne cèdent rien sur ce registre, sublimant plus qu’ils n’enjolivent. Ils y parviennent grâce à la puissance d’évocation de leur dessin qui laisse apparaître crayonnés ondulants, silhouettes élastiques, réalisme du décor et couleurs enchanteresses. S’y ajoutent des dialogues inspirés d’Audiard et une bande-son traversée de chœurs enfantins qui se résolvent sur Armstrong et Fitzgerald… Fine alchimie qui rend les relations et les émotions quasi palpables.

Cinéma
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