Cartes de presse en exil

Structure atypique, la Maison des journalistes, à Paris, accueille des réfugiés du monde entier empêchés d’exercer leur métier.

Jean-Claude Renard  • 16 décembre 2015 abonné·es
Cartes de presse en exil
© Photo : Lisa Viola ROSSI

Traqués, persécutés, interdits. En butte aux autorités, avec une liberté d’expression muselée. La Maison des journalistes (MDJ) abrite un arc-en-ciel de cartes de presse en exil. Une cosmogonie pêle-mêlant les nationalités, des hommes, des femmes, avec leur culture, leur langue, leurs itinéraires différents. Des journalistes venus pour la plupart aujourd’hui de Syrie, d’Iran, de Turquie, de République démocratique du Congo ou du Burundi, mais encore du Bangladesh et d’Afghanistan, victimes de répression, accueillis dans une Maison représentant, mine de rien, le sismographe de la situation de la presse dans le monde.

Créée en 2002, la MDJ a d’abord ouvert ses portes à Bobigny, avant de s’implanter dans le XVe arrondissement parisien, au 35, rue Cauchy, dans les murs d’une ancienne usine. Elle est financée à hauteur de 350 000 euros par an par la Mairie de Paris, des médias parrains (TV5 Monde, Arte, RFI, Radio France, notamment), Presstalis, des organismes comme la Scam et le Comité de protection des journalistes. Sur place, les journalistes y trouvent un accueil plus que chaleureux. Un accompagnement, d’abord, dans leurs démarches administratives, juridiques et professionnelles, tandis que leur sont proposés des activités culturelles, des rencontres avec leurs homologues français, des ateliers de formation, dont les cours de français sont évidemment le point d’orgue, et une aide pour ceux ayant acquis le statut de réfugié politique afin de retrouver un emploi. Mais la MDJ se veut aussi un lieu de résidence, disposant d’installations communes et de quatorze chambres pour loger demandeurs d’asile et réfugiés pour une durée minimum de six mois (et ils sont accompagnés après leur départ). Vivre ensemble ici, c’est peu dire. En une dizaine d’années, ce sont 319 journalistes qui ont déjà transité par ce lieu de renaissance et de résurrection. Curieusement, s’il y a eu quelques tentatives en Espagne ou en Allemagne, cette structure peut se targuer d’être unique au monde. « Est-ce dû à une solidarité plus forte, à une attention à la liberté d’expression ? Qui sait ? Peut-être est-ce lié au siècle des Lumières, à une tradition révolutionnaire ? », s’interroge Denis Perrin, journaliste et membre du conseil d’administration de la MDJ. En attendant, elle propose des missions d’information au public, des actions de sensibilisation articulées autour de la liberté de la presse. Parce qu’il ne s’agit pas là seulement de défendre une corporation.

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