COP 22 : un rapport accablant réveille à peine la conférence

Face à des diplomates à la recherche d’un consensus introuvable, les spécialistes de la météo rappellent la réalité.

Claude-Marie Vadrot  • 14 novembre 2016 abonné·es
COP 22 : un rapport accablant réveille à peine la conférence
© Photo : SAJJAD HUSSAIN / AFP.

Alors que la conférence climat est censée entrer dans sa seconde partie décisive avec l’arrivée des ministres et de quelques (rares) premiers ministres et chefs d’État dont François Hollande, les diplomates ne savent toujours vraiment pas sur quoi ils doivent discuter. « Tout simplement, explique un membre (lucide) du cabinet de Ségolène Royal, parce que l’année dernière à Paris nous avons fait croire à de nombreux pays et aux opinions publiques qu’avec l’accord de Paris, nous avions tout réglé et donc que la planète était quasiment sauvée. De plus, avec l’élection de Donald Trump, il va falloir reprendre tout à zéro et de nombreux pays vont s’engouffrer dans cette brèche pour revenir sur leurs engagements qui étaient souvent a minima ».

Pourtant, dans une grande indifférence, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) a publié dans la journée de lundi un point très inquiétant sur l’évolution du climat et les conséquences du dérèglement en cours. Ses responsables expliquent d’abord que selon leurs observations et calculs, « la température moyenne de la planète battra en 2016 tous les records depuis la fin du XIX° siècle. Ce qui signifie que 16 années des 17 années les plus chaudes connues par la terre, ont été mesurées depuis l’An 2000, la seule exception, étant 1998 ».

La concentration des gaz à effet de serre augmente

Dans leur étude communiquée aux experts et aux diplomates, les scientifiques de la météo ajoutent que « les concentrations de gaz à effet de serre continuent d’augmenter et vont atteindre de nouveaux records, que la glace couvrant les mers arctiques reste à des niveaux très bas, que le regel habituel du mois d’octobre s’y fait attendre et que les glaciers recouvrant le Groenland ont poursuivi leur fonte ». Pour expliquer et illustrer cette situation, ils rappellent que la température moyenne de la Sibérie est désormais supérieure de 6° à 7° à ce qu’elle était il y a quelques dizaines d’années (comme en Alaska) ; et aussi que l’élévation des moyennes observées dans le monde n’a plus rien à voir avec l’influence du courant du Pacifique, El Niño. Ce qui signifie que, maintenant, le réchauffement augmente « mécaniquement » le réchauffement ! Et que les mesures envisagées pour réduire les émissions des gaz à effet de serre ne peuvent plus suffire à calmer la fièvre de la planète.

D’où, poursuit le rapport de l’OMM, l’augmentation de la fréquence des vagues de chaleur et des événements météo extrêmes (78 typhons et cyclones de janvier à octobre), l’élévation permanente de la température des eaux maritimes qui entraîne le blanchiment et donc la mort des coraux partout dans le monde et des submersions d’îles qui s’aggravent. L’étude évoque donc également la poursuite de l’élévation du niveau des mers ; mais aussi les sécheresses sans précédent et la recrudescence des grands incendies qui touchent des pays comme l’Afrique du sud et la Californie. Ou, autre exemple, celui qui a brûlé au Canada 590 000 hectares et détruit 2 400 maisons et immeubles dans l’État d’Alberta.

Explosion du nombre de réfugiés climatiques

Le niveau de la catastrophe mondiale liée aux dérèglements a atteint une telle ampleur que le nombre des réfugiés « climatiques » officiellement recensés en 2015 dans 113 pays a été de 19,6 millions. Un chiffre deux fois supérieur au nombre de gens chassés de chez eux par les conflits et la violence. Il est à craindre, estime le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, que les dégâts humains constatés en 2016 soient encore supérieurs…

Un rapport scientifique, au ton plutôt mesuré, qui n’a pour l’instant pas dérangé le ronron technocratique de la conférence dont les responsables se demandent comment faire du neuf et du positif sans faire de peine à quiconque. Même à Donald Trump…

Écologie
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