Les « rebelles » de la maladie de Lyme condamnés en justice

Malgré un plan d’urgence lancé par le gouvernement en septembre, les tribunaux continuent de sanctionner les professionnels de santé qui traitent la maladie hors du protocole officiel.

Politis.fr  • 15 décembre 2016
Partager :
Les « rebelles » de la maladie de Lyme condamnés en justice
© Photo : GARO / Phanie

C’est un nouveau coup dur pour les défenseurs de méthodes alternatives visant à détecter et soigner la maladie de Lyme. Hier, la cour d’appel de Colmar a reconnu Viviane Schaller coupable d’escroquerie à l’assurance maladie. Cette ancienne biologiste de Strasbourg devra rembourser 280 000€ à la sécurité sociale pour avoir systématiquement réalisé deux tests au lieu d’un pour détecter la maladie de Lyme. « Une décision extrêmement décevante » pour son avocat Me Julien Fouray, qui compte se pourvoir en cassation.

Comme nous l’écrivions dans Politis, cette maladie transmise par des piqûres de tiques est mal reconnue en France. Souvent sous-diagnostiquée et insuffisamment prise en charge, Lyme provoque des pathologies qui se confondent avec d’autres symptômes pouvant engendrer syndromes grippaux, douleurs musculaires, grande fatigue, troubles cardiaques et neurologiques.

À lire >> Maladie de Lyme : Psychose ou scandale sanitaire ?

Cent médecins avaient alors tiré la sonnette d’alarme dans l’Obs en juillet dernier. « Madame la Ministre il y a urgence. Vous annoncez un plan d’action national contre la maladie de Lyme pour septembre 2016. C’est un premier pas timide vers la reconnaissance officielle de la maladie de Lyme chronique. »

À lire >> Lancement d’un plan national contre la maladie de Lyme

Certains médecins s’étaient alors organisés pour prendre en charge les patients atteints par la maladie, en dehors du protocole étatique jugé inadapté.

Protocoles non homologués

La justice reproche à Viviane Schaller d’avoir, dans son laboratoire de Strasbourg aujourd’hui fermé sur décision de justice, appliqué pendant des années une méthode de dépistage non-conforme. Selon elle, les protocoles officiels sont inadaptés et ne permettent de détecter qu’une très faible proportion de cas de Lyme. Elle a ainsi annoncé à des milliers de patients en errance thérapeutique dans toute la France, qu’ils étaient porteurs de la maladie alors qu’on leur avait longtemps affirmé le contraire.

Dans ce dossier, Viviane Schaller était poursuivie au côté de Bernard Christophe. Ce diplômé en pharmacie se voyait reprocher d’avoir fabriqué et commercialisé, hors du cadre réglementaire, un remède à base d’huiles essentielles contre la maladie de Lyme : le « Tic Tox ». Comme elle, M. Christophe avait été condamné à de la prison avec sursis, et comme elle, il avait fait appel. Il est décédé samedi 10 décembre d’une crise cardiaque à l’âge de 67 ans. Quatre jours avant la décision.

Marie-Claude Perrin, présidente de l’association « Lyme sans frontières », qui réunit des milliers de patients et dénonce le « déni » de la maladie de Lyme par les pouvoirs publics, s’est dit « scandalisée » par la décision.

La justice n’a même pas reconnu à Viviane Schaller et Bernard Christophe le rôle de lanceurs d’alerte, comme l’ont réclamé leurs avocats lors des deux procès.

Évoquant la « détresse des malades », Marie-Claude Perrin a également souligné que cette condamnation ne ferait que « durcir la position des associations, au lieu d’ouvrir le dialogue ».

Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don