Rafael Correa, un ex-chef d’État résistant devant les insoumis

L’ex-président équatorien était vendredi l’invité d’honneur de l’université d’été de la France insoumise. Il y a donné une conférence sur « le socialisme du bien-vivre » revivifiant les positions politiques du mouvement.

Nadia Sweeny  • 26 août 2017 abonné·es
Rafael Correa, un ex-chef d’État résistant devant les insoumis
© Photos : Michel Soudais

C’est sous les cris de « Correa amigo, el pueblo esta contigo » que Rafael Delgado Correa a été accueilli vendredi aux « amphis d’été » de la France insoumise organisés sur un campus de l’université d’Aix-Marseille. L’ancien président équatorien, inspiration assumée de Jean-Luc Mélenchon, est venu parler de son « socialisme du bien-vivre », abordant des thématiques chères au leader de la France insoumise.

« Nous devons à l’Amérique latine le fait que le flambeau du combat est toujours resté allumé », a scandé le député de Marseille, en présentant son invité, qu’il tutoie. Fier qu’à la direction de la FI, « on parle tous espagnol », Jean-Luc Mélenchon a ouvert la conférence par un hommage au peuple équatorien, « qui nous a ouvert le chemin » en créant un « mouvement d’émancipation de l’humanité universel ». Il a aussi remercié « le seul chef d’État » qui a soutenu sa candidature en 2012, auquel il a « emprunté le concept de révolution citoyenne. » Mais, tient-il à souligner, il n’a « jamais eu l’idée de gouverner la France comme l’Équateur », l’Amérique latine n’étant « pas un modèle » mais « une source d’informations ».

Dans le grand amphi plein à craquer, l’ancien président équatorien, qui a quitté le pouvoir en mai dernier, a donc livré, en français, un exposé politique de la situation de son pays et de sa région. Malgré la chaleur écrasante de cette fin d’été, les insoumis ont écouté avec attention le discours de ce chef d’État arrivé au pouvoir en 2006 après une période de grande instabilité politique – sept présidents se sont succédé en moins de dix ans et aucun des trois derniers n’a pu terminer son mandat. Dès son arrivée à la fonction suprême, Rafael Correa a fait voter une nouvelle constitution et créé une assemblée constituante.

© Politis

Sans rentrer dans les détails de son expérience dont s’est inspirée la France insoumise, Rafael Correa a vanté les mérites de sa politique sociale : 1,8 million d’équatoriens seraient sortis de la misère, faisant de son pays l’une des trois nations les moins inégalitaires d’Amérique du Sud. Malgré les difficultés économiques, dues d’après l’ancien président, économiste de formation, à un cumul de chocs externes négatifs (tremblement de terre, crise des entreprises pétrolières, etc.), la pauvreté a continué de reculer. « L’Amérique latine a vécu un changement d’époque, elle a entamé un processus » face auquel, la droite se rebiffe.

Rafael Correa voit derrière les diverses tentatives de mise en place de « dictatures militaires financées par les gouvernements du nord », la main des opposants politiques de droite. «Tous les pays où la gauche était au pouvoir ont subi une tentative de coup d’État. » D’après lui, les populations sorties de la pauvreté, qui font aujourd’hui parties de la classe moyenne, ne se sont pas mobilisées pour défendre le pouvoir car « ceux qui ont surmonté la pauvreté demandent plus et se laissent récupérer par la droite dont le marketing est bien ficelé ».

Le parallèle avec la stratégie d’Emmanuel Macron est flagrant quand l’ex-président équatorien décrit une droite qui « a un nouveau discours, de nouveaux visages, des leaders qui se présentent comme des PDG et détiennent les médias », avant de se demander si « une société peut être libre quand l’information est fournie par une entreprise privée à but lucratif ». Les médias sont au cœur des attaques de Correa. Non seulement ils « représentent le vrai pouvoir politique » mais ils sont surtout un « pouvoir sans contre-pouvoir ». Une position que l’on retrouve dans les discours de Jean-Luc Mélenchon.

Pour conclure son intervention, Correa cite Simon Bolivar par un tonitruant : « Hasta la victoria siempre » et la foule de clamer « Résistance, résistance ». La boucle est bouclée.