Olivensteins : Le retour des sales gosses

Fin de quarantaine réussie pour les Olivensteins, qui sortent enfin leur premier album.

Jacques Vincent  • 20 décembre 2017 abonné·es
Olivensteins : Le retour des sales gosses
© photo : DR

Le premier épisode de la vie des Olivensteins a été bref mais remarqué dans le monde du punk en version française. Un 45 tours 3 titres en 1979, et la justice leur a montré la sortie. Le célèbre directeur du centre médical Marmottan, spécialisé dans les addictions, dont ils avaient chapardé le nom comme des sales gosses, avait peu goûté la plaisanterie – et plus du tout quand ils ont commencé à jouer sur scène un morceau intitulé « Olivenstein, je t’ai dans les veines ». Exit donc les Olivensteins en 1980, mais, à ce moment-là, la fête punk était déjà finie.

Les protagonistes ont continué quelque temps sous d’autres noms, Rythmeurs puis Rustics, mais les Olivensteins n’ont refait surface qu’en 2013 pour un concert, puis un autre, jusqu’à finir par enregistrer cet album. Le personnel a un peu changé, mais il reste le trio formé par Gilles et Éric Tandy – le premier joue de la guitare et chante en mordant à pleines dents dans les mots écrits par son frère –, et Vincent Denis, qui tient la deuxième guitare.

Ce qui a surtout changé, c’est l’époque et le fait qu’on ne chante pas la même chose à 20 ans et à 50 ans passés. Fini, donc, la pure provocation et les « Euthanasie papy/Euthanasie mamie/Votre calvaire est enfin fini », et autres « Pétain, Darlan, c’était l’bon temps ». Seul peut-être « Fier de ne rien faire » garde sa pertinence de slogan résistant dans la France macronienne. Les chansons d’Inavalable portent surtout un regard acide sur un monde dominé par l’argent, l’arrogance, le cynisme et la cupidité.

Ce que le groupe a su conserver, en revanche, c’est son goût pour les mots, leur sonorité et les refrains tirés comme des flèches. « C’est une nouvelle ruée vers l’or/Tous au magot/Vite au trésor/Le bon filon c’est pour les cadors » (« Grand Chef ») ou encore : « Je suis juste/Ce que je suis/Il est impossible d’être impassible/Quand on sert de cible » (« Je suis juste »). Et une prédilection pour un rock incisif et ciselé, dans lequel l’urgence n’empêche pas la délicatesse, pour les mélodies fignolées et l’élégance des guitares aiguisées.

Une conception de l’écriture qui prend soin aussi de doter chaque chanson d’un signe particulier et de lui conférer une identité propre pour la fixer dans la mémoire de l’auditeur. Le Bo Diddley beat de « Pourquoi penser à moi » ou le riff/point de croix de guitare du magnifique « Temps de chien », dans lequel le vent mauvais a peu à voir avec la météo, en sont deux exemples parmi d’autres. Les Olivensteins sont de retour. Gare à l’addiction.

Inavalable, Les Olivensteins, Smap Records.

Musique
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