Une idée pour Franz-Olivier

FOG ne reste presque jamais plus de trois semaines sans pousser de rêches appels à réduire la dépense publique.

Sébastien Fontenelle  • 21 mars 2018 abonné·es
Une idée pour Franz-Olivier
© GUILLAUME SOUVANT / AFP

L’hebdomadaire Le Point, propriété du groupe Pinault, s’est d’assez longue date spécialisé dans la confection de couvertures dénonçant « les assistés » – chômeurs, chômeuses, fonctionnaires et autres retraité(e)s – qui « ruinent la France ».

L’éditorialiste en chef (et ancien directeur) de cette fascinante publication – l’inénarrable Franz-Olivier Giesbert (FOG), qui a fait toute sa carrière dans des périodiques gavés d’aides publiques à la presse [1] –, quant à lui, ne reste presque jamais plus de trois semaines sans pousser de rêches appels à réduire la dépense publique. En juin 2014, il décrète ainsi que le « temps » est venu de « guérir la France sans lui demander son avis, quitte à la brutaliser un peu », en réduisant « ses astronomiques dépenses publiques ». En 2015, il proclame : « Ce qui fera reculer le Front national, c’est une politique économique et sociale qui lui coupe l’herbe sous le pied. Pour ce faire, il n’y a pas trente-six solutions. D’abord, assouplir le droit social avec la “flexi-sécurité”. Ensuite, réduire drastiquement les dépenses publiques. »

Dans cette même période – il faut y insister un peu –, l’État, providentiel, continue, bon an mal an, de nantir Le Point de millions d’euros d’aides publiques. Mais ce minuscule décalage entre ses imprécations et la réalité de ses propres pratiques ne tarit nullement l’inspiration de FOG, qui s’emporte encore, en 2016, contre les dilapidations d’une France recroquevillée, selon lui, dans le bolchevisme : « Nous dépensons de plus en plus pour l’État-providence, avec un taux aberrant de 57 % de dépenses publiques par rapport au PIB. Un taux qui nous rapproche plus, soit dit en passant, du modèle communiste que d’une économie moderne [1]_. »_

Et voilà que nous apprenons, par Mediapart, qui vient de publier sur ce sujet une admirable enquête, que le groupe Pinault – propriétaire, donc, de l’hebdomadaire Le Point – serait impliqué dans « une évasion fiscale à 2,5 milliards d’euros », qui constituerait, en cette matière, « la plus grosse affaire […] présumée mise au jour pour une entreprise française ».

Le mot important, ici, est bien sûr « présumée ». Il nous invite à la prudence, aussi longtemps que la justice n’aura pas tranché. Mais du moins pouvons-nous présumer, justement, que, si d’aventure elle confirme que le groupe Pinault a soustrait à l’impôt quelques milliards d’euros, les gens du Point – Giesbert en tête – retrouveront, pour dénoncer ce gigantesque scandale, les mêmes mots, extrêmement durs, qu’ils manipulent quand ils lancent des haros fanatiques sur « la France assistée ».

[1] Avec aussi quelques détours par la télévision publique, où ses émoluments – dont le montant n’est pas connu – ont donc été financés par les contribuables.

[2] L’année d’après, il ajoute que « la France » est « plombée par une dette qui culmine à 2 190 milliards d’euros » et par le « niveau affolant des dépenses publiques ». Mais il ne réclame toujours pas que soit promptement abolie la si dispendieuse coutume des aides étatiques à la presse.

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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